Aide médicale d'Etat : huit ex-ministres de la Santé alertent sur «les conséquences inacceptables» d'une réforme

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avec AFP / Crédit photo : LUDOVIC MARIN / AFP
Restreindre ou supprimer l'aide médicale d'Etat (AME) pour les sans-papiers aurait des "conséquences sanitaires, humaines, sociales et économiques inacceptables", s'inquiètent jeudi huit anciens ministres de la Santé, dans une tribune publiée dans "Le Monde".

Huit anciens ministres de la Santé, ont publié jeudi une tribune dans Le Monde pour alerter contre les risques de la réduction ou la suppression de l’Aide Médicale d’État (AME). "Affaiblir l'AME, c'est exposer notre système de santé à une pression accrue de prises en charge plus tardives et donc plus graves et plus coûteuses", alertent ces personnalités issues de différents partis politiques, essentiellement du bloc central.

Parmi les signataires figurent Aurélien Rousseau, Roselyne Bachelot, François Braun, Agnès Buzyn, Agnès Firmin Le Bodo, Marisol Touraine, Frédéric Valletoux et Olivier Véran. Plusieurs ministres du gouvernement Barnier, en premier lieu le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (LR), se sont positionnés pour une transformation de l'AME en "aide médicale d'urgence". 

Pas un "appel d'air" pour l'immigration

Les anciens ministres soulignent que l’AME est essentielle pour prévenir des complications médicales graves, évitant des traitements plus lourds et coûteux à un stade avancé de la maladie. "L'AME ne constitue pas un facteur d'incitation à l'immigration dans notre pays, qui serait aux frais des Français. C'est un fantasme contraire aux faits", insistent les cosignataires, assurant que le dispositif se limite déjà à "un périmètre précis de soins".

"Toucher à l'aide médicale d'État va à rebours de la logique même des politiques de santé publique que nous avons mises en place", ajoutent-ils. L'AME garantit aux étrangers en situation irrégulière la prise en charge gratuite de soins médicaux sous deux conditions : la résidence irrégulière continue en France depuis plus de trois mois et des ressources inférieures à un plafond 10.166 euros par an (soit 847 euros par mois).

Le gouvernement envisage des dispositions

L’AME, qui couvre les soins médicaux de base, les frais d’hospitalisation, certains dépistages et vaccinations, ainsi que la contraception et l’IVG, a bénéficié à environ 466.000 personnes en 2023. Le coût de cette aide s’élève à 1,2 milliard d’euros en 2024, soit seulement 0,5 % des dépenses de santé de la Sécurité sociale. Selon les anciens ministres, toucher à cette aide irait "à rebours de la logique même des politiques de santé publique".

Cette tribune intervient alors que le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a récemment laissé entendre que le gouvernement pourrait "prendre des dispositions", possiblement par voie réglementaire, pour transformer l’AME en une "aide médicale d'urgence" aux contours beaucoup plus restreints. Ce projet, souvent avancé par la droite, pourrait entrer en conflit avec une partie du camp présidentiel pour qui l’AME constitue une ligne rouge.