Deux mois que François Fillon patauge dans les affaires. À l'emploi présumé fictif de son épouse sont venus s'ajouter, au fil des semaines, ceux de ses enfants, des soupçons sur des offres de costumes, puis de montres de luxe. Bravant la tempête et les mises en examen, le vainqueur de la primaire de la droite a tenté maintes fois de relancer une campagne très difficile sur le terrain. Meetings, réunions publiques, conférences de presse, interviews exclusives, rien n'y a fait. "C'est l'encéphalogramme plat dans les sondages", notait encore la semaine dernière Frédéric Dabi de l'Ifop. François Fillon misait aussi sur les débats, exercice dans lequel il avait tant brillé pendant la campagne de la primaire. Las, il n'a jamais su réellement tirer son épingle du jeu à cinq, puis à onze.
Dans ce contexte, le meeting que s'apprête à donner le candidat LR dimanche après-midi au Parc des expositions de la Porte de Versailles, à Paris, est d'une importance cruciale. Malgré le choix d'une date au beau milieu des vacances de Pâques, François Fillon espère bien remobiliser ses troupes.
Le moment ou jamais. En réalité, il n'a pas le choix. À deux semaines du premier tour, c'est le moment où jamais. Une démonstration de force maintenant lui donnerait l'occasion de marquer les esprits, puis surfer sur la vague jusqu'au premier tour. Car le candidat et son entourage croient plus que jamais en l'existence d'un "vote caché". "Il y a quelque chose de très communautaire dans les votes", explique un poids lourd LR à L'Opinion. "Ce qu'on veut, c'est qu'en voyant les images, les gens aient envie d'en être. Il faut leur mettre dans la tête que François Fillon peut encore gagner et alors ils voleront au secours de la victoire."
"Plus de place pour les hésitations". Avant le meeting, plusieurs caciques de la droite ont renouvelé leur soutien à François Fillon. Nicolas Sarkozy s'est fendu vendredi d'un post Facebook pour appeler au "rassemblement au service d'une alternance franche et crédible". "Il n'y a plus de place pour les hésitations ou les états d'âme", a-t-il écrit. "François Fillon est le seul parmi les candidats à avoir l'expérience qui lui permettra d'incarner et de réussir l'alternance dont la France a tant besoin." Quant à Alain Juppé, c'est en moins de 140 signes sur Twitter qu'il a "confirmé [son] soutien" au vainqueur de la primaire. "Le monde est dans la tourmente, la France a besoin d'un Président expérimenté. F. Fillon a cette expérience." De quoi ressouder la famille politique du candidat, alors que de nombreux élus font la campagne à reculons, et sont partis en vacances ces derniers jours au lieu d'aller tracter sur les marchés.
Le monde est dans la tourmente, la #France a besoin d'un Président expérimenté. F. #Fillon a cette expérience. Je lui confirme mon soutien.
— Alain Juppé (@alainjuppe) 7 avril 2017
Frémissement dans les sondages. Donné troisième dans les enquêtes d'opinion, François Fillon a pu se consoler cette semaine avec un léger frémissement dans les sondages. L'enquête d'OpinionWay pour Les Echos publiée vendredi montre une progression de deux points des intentions de vote pour le candidat de la droite. Ce qui équivaut à 20% des voix et reste insuffisant pour se qualifier pour le second tour face à une Marine Le Pen à 25% et un Emmanuel Macron à 24%. Mais c'est son meilleur score depuis un mois. Et le tassement de l'ancien ministre de l'Économie lui laisse espérer une deuxième place et un second tour face à la présidente du Front national.
Cibler Macron. Le fondateur d'En Marche est donc devenu la cible principal de François Fillon, qui a lancé ces derniers jours une vaste offensive dans les médias et sur les réseaux sociaux pour le faire passer pour l'héritier de François Hollande. En meeting à Strasbourg jeudi, le candidat de la droite a pilonné Emmanuel Macron, faisant l'éloge d'une "culture française" dont l'ancien ministre de l'Économie avait nié l'existence. Sa démonstration de force porte de Versailles devrait être l'occasion de décocher de nouvelles flèches.
Montrer les muscles. Avant le meeting, François Fillon devrait prendre une photo avec les 577 candidats de la droite et du centre investis pour les législatives. Encore une mise en scène directement adressée à Emmanuel Macron, dont la capacité à constituer une majorité parlementaire en cas de victoire reste en suspens. Même le choix du parc des expositions ne doit rien au hasard. C'était là que François Fillon avait achevé sa campagne victorieuse de la primaire. C'était là aussi qu'en décembre, le fondateur d'En Marche! avait fait une démonstration de force, réunissant quelque 15.000 personnes, selon son entourage. François Fillon, lui, table sur 20.000.