Emmanuel Macron avait promis d'agir vite. "Je n'aurai pas d'état de grâce, je ne pourrai pas présider comme on préside depuis 1958", déclarait-il le 5 mai sur Europe 1. Le leader d'En Marche! a eu l'occasion d'évoquer à plusieurs reprises l'agenda des réformes auxquels devront s'atteler rapidement, très rapidement, les ministres désignés mercredi. Ces derniers doivent notamment recevoir une feuille de route, fixant les objectifs à atteindre.
Avant l'été : moralisation de la vie public et appréciation des finances
Emmanuel Macron entend ouvrir son programme de réformes par une mesure hautement symbolique, en proposant une nouvelle loi de moralisation de la vie politique. Elle était l'une des conditions sine qua none du ralliement de François Bayrou pendant la campagne, et le nouveau chef de l'Etat compte honorer sa promesse sans attendre le renouvellement de l'Assemblée nationale en juin. Le projet "sera mis sur la table du conseil des ministres avant les législatives", avait-il précisé au Journal du Dimanche début avril. Parmi les mesures proposées : une limitation à trois du nombre de mandats consécutifs et un meilleur encadrement des rémunérations des députés. Et, Emmanuel Macron tire les leçons des remous judiciaires qui ont agité la campagne de François Fillon : les élus ne pourront plus employer leurs proches.
L'autre grand chantier auquel souhaite s'atteler avant l'été le nouveau locataire de l'Élysée est celui des finances publiques. Encore candidat, il avait promis un "audit" sur la question "afin de disposer à la mi-juin des résultats de la gestion en cours", précisait-il en avril sur France 2. Favorable au prélèvement à la source, Emmanuel Macron craint cependant les difficultés que ce dispositif, mis en place par la précédente majorité, pourrait poser aux TPE et PME. Là encore, un audit sur la question doit être rapidement lancé, a annoncé vendredi Benjamin Griveaux, le porte-parole de La République en marche!. "On va regarder cet audit et, si l'expérimentation peut être lancée dans de bonnes conditions, elle sera lancée et si ce n'est pas cas, il y aura un report", a-t-il indiqué sur LCI.
Cet été : deux dossiers minés, la réforme du code du Travail et la menace terroriste
La réforme du code du Travail sera le premier chantier d'envergure de la nouvelle présidence. Il s'agit d'un dossier particulièrement sensible dans la mesure où Emmanuel Macron a inscrit sa démarche dans le prolongement de la loi El Khomri qui a nourri de nombreux blocages durant la dernière année du quinquennat de François Hollande. Voulant agir rapidement, et espérant passer outre une éventuelle opposition parlementaire, le président de la République compte procéder par ordonnances, ce qui inquiète les syndicats. Sur TF1, le nouveau Premier ministre, Édouard Philippe, s'est pourtant voulu rassurant. "Je sais les inquiétudes que suscite [la réforme, ndlr], je vais les entendre, nous allons travailler, mais la volonté du président de la République, elle est clairement affirmée et moi, mon objectif, c'est de faire en sorte que les objectifs qu'il a fixés soient atteints", a-t-il déclaré, assurant qu'"il y aura[it] évidemment consultation et discussion" avec les partenaires sociaux.
Parmi les principales mesures prônées : accorder la primauté aux accords d'entreprise sur les accords de branche, donner plus de place au référendum d'entreprise, plafonner les indemnités prudhommales en cas de licenciement injustifié et rétablir la défiscalisation des heures supplémentaires.
Le chef de l'État compte également engager au début de l'été un débat parlementaire sur le maintien de l'Etat d'urgence, prorogé en décembre dernier le temps de la présidentielle et des élections législatives, et qui doit théoriquement s'arrêter le 15 juillet 2017. "L’État d’urgence doit être maintenu aujourd'hui, et il ne peut être levé qu’à la lumière d’informations dont ni vous ni moi ne disposons", avait déclaré, mi-mars, Emmanuel Macron sur le plateau de France 2, celui qui était encore candidat. Toujours dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, le nouveau chef des armées compte également mettre en place un état-major permanent des opérations de sécurité intérieure, de renseignement et de lutte contre le terrorisme, mais aussi une cellule spéciale du renseignement centrée dont le travail se concentrera sur le groupe Etat islamique.
À la rentrée : l'éducation et le budget sur la table
À la rentrée 2017, l'exécutif se consacrera à l'éducation, et plus particulièrement à l'école primaire. Emmanuel Macron veut abaisser à douze le nombre d'élèves dans les classes de CP et de CE1 des zones d'éducation prioritaire, mais aussi accorder davantage d'autonomie aux communes pour organiser le temps scolaire et aux collèges pour rétablir, ou non, les classes bilangues et les sections européennes supprimées par la dernière réforme.
Le budget 2018 doit être débattu à partir du 1er octobre. Un texte d'envergure qui conditionnera plusieurs des promesses formulées par le candidat en matière de politique économique, à savoir faire passer le déficit public sous la barre des 3%, exonérer 80% des ménages de la taxe d'habitation, transformer le crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) en allégements de charges pour les entreprises et transformer l'ISF en une taxe de 30% sur la rente immobilière.
Avant la fin de l'année : le chantier des institutions et de l'UE
Favorable à l'instauration d'une dose de proportionnelle aux législatives, Emmanuel Macron avait indiqué au micro de RTL, pendant l'entre-deux-tours, qu'il ne pourrait pas mettre en place cette mesure avant les élections de juin. Mais "je souhaite le faire dans la première année", a-t-il cependant précisé. Lors d'un entretien à Mediapart, Emmanuel Macron a encore déclaré qu'il pourrait consulter les Français, via un référendum, si sa proposition se voyait retoquer par le Parlement.
Renouveau oblige, le nouveau président pourrait également, avant la fin de l'année, confirmer ou non les haut fonctionnaires aux principaux postes dans l'administration publique. "Pour mettre en œuvre une politique ambitieuse, il faut des directeurs qui endossent la feuille de route décidée par le politique", avait-il déclaré au JDD.
À l'issue, lundi, de sa première visite à Berlin en tant que chef de l'État et d'une rencontre avec Angela Merkel, Emmanuel Macron a aussi évoqué "la mise en place d'un une feuille de route commune [avec l'Allemagne, ndlr] pour l'UE et la zone euro", et qui pourrait inclure la révision de certains traités.