Ne demandez pas à Nicolas Sarkozy ce qu'il pense de la sortie du livre de son ancien conseiller spécial, Patrick Buisson. "Il ne m'intéresse nullement", a déclaré l'ancien président lundi, au micro d'Europe 1. Pourtant, La cause du peuple (éd. Perrin), dont les bonnes feuilles ont été publiées cette semaine dans L'Express, risque fort de s'inviter dans la campagne de la primaire de la droite. En 464 pages, l'ancien rédacteur en chef de Minute, donné pour responsable par ses détracteurs du virage à droite de Nicolas Sarkozy –Nathalie Kosciusko-Morizet disait ainsi de lui qu'il voulait "faire gagner Charles Maurras"- aligne les révélations gênantes à propos de l'ancien chef de l'État.
La sortie du livre de Buisson n'est "pas un...par Europe1fr
L'entreprise ressemble fort à une vengeance, les deux hommes étant brouillés depuis deux ans. En 2014 en effet, Patrick Buisson avait été épinglé pour avoir enregistré Nicolas Sarkozy et Carla Bruni à leur insu, avant d'être condamné pour atteinte à la vie privée en 2014. À la télévision, Nicolas Sarkozy s'en était pris publiquement à lui et sa "trahison".
Bertrand "méchant", Larcher "trop laid". Dans son ouvrage, Patrick Buisson révèle par exemple les jugements parfois très sévères de l'ancien président sur les autres personnalités politiques. De Xavier Bertrand, maintenant président de la Région des Hauts-de-France, Nicolas Sarkozy aurait dit que "c'est un méchant. Dix ans à essayer de placer des assurances en Picardie, dix ans à taper aux portes et à se prendre des râteaux, ça a de quoi vous rendre méchant pour le restant de vos jours. C'est d'ailleurs pour ça que je l'avais choisi".
Gérard Larcher, président du Sénat, est critiqué pour son physique, tandis que les femmes du gouvernement sont, elles, louées uniquement pour le leur. "Je sais bien que je suis le Tom Cruise du pauvre", aurait déclaré l'ancien président. "Mais enfin, Gérard Larcher ministre, ce n'est pas possible : il est trop laid ! Avec Rachida [Dati, garde des Sceaux] et Rama [Yade, secrétaire d'État chargée des Droits de l'Homme, puis des Sports], on va leur en mettre plein la vue."
Les fidèles ne sont pas épargnés. Nicolas Sarkozy n'est pas plus tendre avec son prédécesseur, Jacques Chirac, selon lui "le plus détestable de tous les présidents de la Ve République". "Je n'ai jamais vu un type aussi corrompu", aurait-il lâché. Même les fidèles ne sont pas épargnés. Alors qu'il est son Premier ministre en 2010, François Fillon inaugure la mosquée d'Argenteuil. Cela ne plaît pas du tout à Nicolas Sarkozy, qui s'emporte. "Pauvre type, tant qu'il y est, il n'a qu'à venir mercredi au Conseil des ministres en babouches et avec un tapis de prières." Quant à Christian Estrosi, président de la région Paca, c'est un "abruti" qui "a une noisette dans la tête".
Émeutes tolérées en 2006. Au-delà des attaques personnelles, le livre de Patrick Buisson accuse Nicolas Sarkozy de ne pas être intervenu sciemment lors des émeutes anti-CPE qui se sont déroulées en 2006, alors qu'il était ministre de l'Intérieur. "Nous avions pris la décision de laisser les bandes de blacks et de beurs agresser les jeunes Blancs aux Invalides, tout en informant les photographes de Paris Match", écrit l'ancien conseiller. "L'émotion fut en effet à son comble après la publication des photos […] dont l'opinion ne retiendrait qu'une chose : des hordes sauvages étaient entrées dans Paris."
Le FN à portée de vote. Enfin, La cause du peuple donne à voir un Nicolas Sarkozy qui n'a pas voulu se couper du Front national. "Bien sûr que nous avons des valeurs communes avec le FN", aurait ainsi déclaré Nicolas Sarkozy en réponse à François Fillon, qui affirmait le contraire. "Les valeurs du Front national sont celles de tous les Français ; c'est la manière dont le FN les exprime qui est choquante. Les Français n'aiment pas les plats trop pimentés qui emportent la gueule."
Les valeurs du Front national sont celles de tous les Français.Des signatures pour Le Pen. Patrick Buisson raconte également que Nicolas Sarkozy aurait poussé dans son propre camp pour que Jean-Marie Le Pen puisse obtenir les 500 parrainages nécessaires pour se présenter à l'élection présidentielle de 2007. Le candidat de l'UMP donné des instructions à Alain Marleix, spécialiste des élections au parti, de "faire remonter une cinquantaine de signatures d'élus à Le Pen et à lui seul". Entre les deux tours, l'ancienne éminence grise assure avoir contacté le président frontiste à la demande de Nicolas Sarkozy, pour lui signifiait que ce dernier Jean-Marie Le Pen s'engageait à "assurer une représentation équitable des minorités [politiques] dans les deux assemblées" du Parlement.
Un échange dont Jean-Marie Le Pen n'a "aucun souvenir", a-t-il affirmé à BFM TV. Marine Le Pen, elle, en revanche, avait mentionné en 2014, à L'Obs, un déjeuner avec son père et Patrick Buisson entre les deux tours. Selon elle, lors de ce rendez-vous, l'ancien conseiller de Nicolas Sarkozy a tenté d'obtenir une consigne de vote favorable de la part du président du Front national pour le second tour. En vain, car Jean-Marie Le Pen avait appelé à l'abstention.