Jeux de rôle, fiches : comment les candidats à la primaire de la droite ont préparé le débat

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Les sept candidats à la primaire de la droite s'affronteront lors d'un premier débat, jeudi. © AFP
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Cette confrontation, jeudi 13 octobre, la première d'une série de trois débats, est prise avec le plus grand sérieux par les candidats à la primaire de la droite. Chacun sa méthode pour creuser (ou réduire) l'écart avec ses rivaux.

Le tableau est inédit à droite : sept personnalités politiques sur le même plateau, jeudi soir, pour exposer leur programme. Les candidats à la primaire de la droite s'apprêtent à tenir le premier débat d'une série de trois avant les deux tours du scrutin, prévus les 20 et 27 novembre prochain. Alain Juppé, Nicolas Sarkozy, François Fillon, Bruno Le Maire, Nathalie Kosciusko-Morizet, Jean-Frédéric Poisson et Jean-François Copé ont tous des objectifs différents. Mais tous se préparent activement, espérant conforter leur avance pour les favoris, ou inverser la tendance pour les outsiders.

"On le prépare à fond". Un débat, ça ne s'improvise pas. "Bien sûr, on le prépare à fond", confirme Benoist Apparu, soutien d'Alain Juppé. Le maire de Bordeaux a "des fiches et des argumentaires" pour s'entraîner. Son équipe a aussi prévu de l'entourer de jeunes sur le plateau, afin de coller à l'image qu'il essaie de se forger en tant que candidat. Comme il n'y a pas de place pour tout le monde, certains piliers, comme Benoist Apparu lui-même, regarderont donc le débat à la maison, "avec un plateau-repas". En revanche, "il n'y aura pas de répétition générale ni de jeux de rôle".

"Libre, détendu et cool". Beaucoup de candidats assurent d'ailleurs ne pas s'adonner aux sessions de media training, à l'image de Nicolas Sarkozy. "Comment je m'y prépare ? Voyez, une fondue et une séance de dédicaces", a lancé le deuxième homme des sondages mardi, selon Le Parisien. Bruno Le Maire, lui aussi, s'est montré décontracté dans les colonnes du JDD ce week-end. "Lundi, mardi, mercredi, c'est free. Je vais courir, lire et me promener avec les enfants. Je veux arriver à ce débat libre, détendu et cool."

" Je veux arriver à ce débat libre, détendu et cool. "

Jeu de rôle chez Le Maire. Le candidat du renouveau a néanmoins omis de préciser qu'entre les promenades et les joggings, il s'était adonné, dans son QG, à l'exercice du jeu de rôle. "Cool", mais pas trop quand même. "Deux, voire trois séances" sont prévues, précise Le Point. Pour reproduire les conditions du direct, ses proches ont endossé le costume de ses adversaires. Sébastien Lecornu, président du conseil général de l'Eure et visiblement passé maître dans l'art de l'imitation de Nicolas Sarkozy, a joué l'ancien chef d'État. "Damien Abad, député de l'Ain, a hérité du rôle d'Alain Juppé", écrit l'hebdomadaire. L'équipe de Bruno Le Maire compte le briefer sur sa gestuelle. Histoire que le "renouveau" ne paraisse pas trop coincé.

"Je ne suis pas un paquet de lessive". Les jeux de rôle, très peu pour Jean-Frédéric Poisson. "Pour quoi faire ? Prendre quelqu'un pour un punching-ball ? Fabriquer une poupée vaudou de mes adversaires et lui planter des aiguilles dans les jambes ?", ironise le président du Parti chrétien-démocrate. Lui ne souhaite pas non plus parler face à une caméra pour ensuite analyser ses prestations. "Je ne suis pas un paquet de lessive, je refuse le formatage." Jean-Frédéric Poisson s'entraîne donc avec son équipe, en "se plaçant dans les contraintes de l'exercice". "Sur le plan rhétorique, ce n'est pas facile", reconnaît-il. "Je bafouillerai, je m'arrêterai peut-être, mais c'est aussi la marque de mon authenticité."

"La principale contrainte, c'est le temps". Le constat est le même dans l'entourage de Nathalie Kosciusko-Morizet. "La principale contrainte de l'exercice, c'est le temps. L'objectif est d'être compréhensible et intelligible." De fait, les candidats auront en tout et pour tout 15 minutes de temps de parole, mais par tranche d'une minute maximum. S'ils sont interpellés par l'un de leurs adversaires, ils auront droit à 30 secondes de réponse. La députée de l'Essonne travaille donc essentiellement à synthétiser ses propositions.

" Sur le plan rhétorique, ce n'est pas facile. Je bafouillerai, je m'arrêterai peut-être, mais c'est aussi la marque de mon authenticité. "

"Si on nous cherche, on va nous trouver". Une fois la forme travaillée (ou pas), reste à déterminer une stratégie. Jouer la carte offensive ? Ou, au contraire, faire fi de ses adversaires pour se concentrer sur son programme ? La plupart des participants semblent avoir opté pour la seconde option. C'est du moins ce qu'ils assurent la bouche en cœur. "François Fillon se prépare au débat depuis cet été mais de façon très détendue", explique Jérôme Chartier, soutien de l'ancien Premier ministre. "On va retrouver un discours de vérité, on a du métier." Nathalie Kosciusko-Morizet, elle, "aborde le débat comme une opportunité de confronter les idées", pas les personnes. "Alain Juppé ne veut pas s'enfermer dans une stratégie", confirme Benoist Apparu. "Mais si quelqu'un tire à la kalachnikov, il faudra bien s'adapter. On va être dans une logique soft, s'occuper de nous et de notre ligne. On n'attaque pas par principe, mais si on nous cherche, on va nous trouver."

 

CINQ CHOSES A SAVOIR - Un débat très millimétré 

"Le débat peut faire évoluer la vision qu'on a d'un candidat". Ce débat peut-il infléchir des sondages qui, pour l'instant, donnent Alain Juppé et Nicolas Sarkozy favoris du premier tour, tandis que François Fillon et Bruno Le Maire se disputent la troisième place ? "C'est pour nous le coup d'envoi de l'intérêt des Français pour la primaire", estime Jérôme Chartier, bras droit de l'ex-Premier ministre. "On joue les Français contre les sondages. Le débat peut faire évoluer la vision qu'on a d'un candidat." Jean-Frédéric Poisson, lui aussi, est convaincu que ce moment "peut changer le cours des choses. La question, c'est de savoir dans quelle proportion". Dans tous les cas, il se félicite d'une configuration dans laquelle petits et gros candidats seront sur un pied d'égalité. "Si vous voulez encore m'appeler l'inconnu de la primaire, dépêchez-vous, il ne vous reste que 24 heures !", plaisante-t-il.

" On joue les Français contre les sondages. Le débat peut faire évoluer la vision qu'on a d'un candidat. "

"C'est une configuration inédite". Chez Nathalie Kosciusko-Morizet, on se félicite de pouvoir (enfin) se concentrer sur le fond des propositions de la candidate plutôt que sur ses difficultés à obtenir des parrainages ou son choix de ralliement au second tour. "Les médias, comme les politiques et leurs équipes, ont tendance à penser que tout le monde a un décrypteur de programme intégré. Mais ce n'est pas le cas de la plupart des Français, qui ne baignent pas dans la politique", analyse l'un des conseillers de la députée de l'Essonne. Avec ce débat, les électeurs "vont voir, pour la première fois, les différences nettes ou les points de convergence de chacun". Quant à savoir si cela sera suffisant pour changer la donne, l'entourage de Nathalie Kosciusko-Morizet préfère rester prudent. "C'est une configuration inédite. Seule l'histoire nous le dira."