Il est des concomitances qui en disent long. Jeudi matin, une photo de Laurent Wauquiez postée la veille au soir laisse Twitter très perplexe. On y voit le président des Républicains dans les ruines de Mossoul, "accompagné du gouverneur" de la ville irakienne "détruite à 90% par les milices de Daech", comme l'explique Bruno Jeudi, journaliste pour Paris Match.
Accompagné du gouverneur de Mossoul, #Wauquiez dans les ruines de la vieille détruite à 90% par les milices de Daech @ParisMatchpic.twitter.com/6YlF2DopQt
— Bruno Jeudy (@JeudyBruno) 6 juin 2018
Alors que le cliché est de plus en plus partagé, Virginie Calmels, numéro deux du parti, s'exprime dans la matinale de France Inter. Elle n'y parle absolument pas de Mossoul mais d'un tract, qui doit être distribué ce week-end dans toutes les fédérations LR, et qui met en avant un slogan : "Pour que la France reste la France". "Je ne l'ai pas validé", dit alors cette ancienne juppéiste ralliée à Wauquiez. "C'est un dysfonctionnement. Ce tract est un peu déséquilibré" et "ridiculement anxiogène".
Le télescopage de ces deux événements, qui montre Laurent Wauquiez en pleine opération de communication à des milliers de kilomètres des instances de son parti, laissées embarrassées devant l'une de ses décisions, souligne à quel point la stratégie déployée récemment par le président des Républicains est illisible.
Critiques en interne. En interne, Laurent Wauquiez peine à s'imposer. S'il a toujours été très populaire auprès de la base militante des Républicains, le chef de la région Rhône-Alpes-Auvergne devait encore convaincre les caciques du parti. Six mois après son élection, ce n'est toujours pas chose faite. Les griefs sont nombreux : le parti n'est pas assez audible, ne parvient pas à imposer ses idées dans un débat écrasé par La République en marche!, et la gestion des instances est par trop verticale. Fin mai, quatre jeunes députés LR avaient obtenu un rendez-vous avec Laurent Wauquiez pour lui faire part de leurs inquiétudes. "On ne fait que subir l'agenda imposé par Macron. On ne produit rien", se plaignait alors l'un d'eux. "Un jour, on soutient sa réforme de la SNCF, le lendemain on fustige sa politique d'immigration. Il faut qu'on trouve notre propre voix."
Le tract de la discorde. Dans ce contexte, l'affaire du tract "Pour que la France reste la France" est la goutte d'eau qui menace de faire déborder le vase. "C'est dommage que cela n'ait pas fait l'objet d'une validation par les instances que Laurent Wauquiez a lui-même créées", a regretté Virginie Calmels jeudi matin. La vice-présidente LR est pourtant généralement peu encline à critiquer son supérieur. "Je m'interroge parce que je ne suis pas certaine qu'il puisse encore avoir de l'impact pour convaincre des électeurs." Certains élus du parti vont même plus loin, à l'image de Robin Reda, député de l'Essonne et proche de Valérie Pécresse. "Qu'on prenne les slogans du FN, je comprends la stratégie", concède-t-il à Europe 1. "Mais je ne distribuerai pas ce tract, il ne témoigne pas d'un travail de fond des Républicains pour essayer de reconquérir l'opinion."
Stratégie incongrue. Au beau milieu de ce débat, l'affichage de Laurent Wauquiez en Irak semble donc incongru. D'autant que si l'objectif était bien de donner au président LR une stature internationale, juste après une visite en Italie et avant un déplacement en Angleterre, la photographie n'a pas vraiment eu l'effet escompté et surtout donné lieu à de nombreux détournements humoristiques de la part des internautes.