Ils étaient tous dans les starting-blocks, prêts à confirmer leur avance ou lancer enfin une campagne poussive. Les sept candidats à la primaire de la gauche ont participé à leur premier débat, jeudi soir, en direct sur TF1. Pendant 2h30, ils ont exposé leurs propositions lors d'un grand oral souvent poussif, sans échanges ni chamailleries. Europe 1 fait le point sur les prestations de chacun.
Valls limite la casse
Souvent comparé à Nicolas Sarkozy, Manuel Valls a pourtant eu plus de chance que le candidat de la primaire de droite quand l'heure du débat est venue. L'ancien Premier ministre a échappé à une distribution de coups pourtant anticipée par tous, commentateurs comme équipe de campagne. Peu attaqué, sinon de façon très détournée – notamment par un Vincent Peillon faussement inoffensif qui a regretté un quinquennat "brutal" et rappelé que "le pouvoir n'est pas un projet" -, Manuel Valls a notamment évité le pire lorsque la loi Travail, ou encore la déchéance de nationalité, ont été abordés.
Il peut remercier ses adversaires, peu enclins à chercher la bagarre, mais aussi la forme du débat, qui ne permet pas vraiment aux concurrents de s'interpeller. Paraissant tendu, voire fébrile au début du débat, parfois dans la récitation sur les thèmes économiques, l'ancien chef du gouvernement est apparu bien plus à l'aise lorsque sont venues les questions de terrorisme ou sécuritaire.
Peillon se démarque, Hamon et Montebourg font le job
Vincent Peillon s'est souvent attaché à prendre de la hauteur. Notamment en rappelant, dans sa minute de conclusion, qu'il n'avait "outré aucune position" et "défié personne" jusqu'ici. Clair, concis, l'ancien ministre de l'Éducation a certes trébuché une fois en parlant d'une personne "d'origine musulmane", mais ses quelques saillies, incisives sans être agressives, lui ont permis de se démarquer.
Arnaud Montebourg et Benoît Hamon, tous deux portés par une dynamique favorable dans les enquêtes d'opinion, ont pris soin de rester dans leur couloir. Le premier s'est montré plus grave, plus lisse, bref, plus "présidentiable" qu'à la primaire de 2011. Quitte à être un peu transparent. Par ailleurs, celui qui a beaucoup travaillé pour perdre son ton trop "aristo" a vu le naturel revenir au galop.
Benoît Hamon, lui, a bénéficié du fait que le débat se cristallise sur certaines de ses propositions, notamment le revenu universel. Cela lui a permis de mettre en valeur son programme et la rupture qu'il souhaite incarner par rapport à ses adversaires. Mais le candidat n'a pas toujours réussi à être clair sur son projet de société, refusant également de répondre à certaines questions – sa définition des "classes aisées" qu'il compte mettre plus à contribution fiscalement - pour revenir à son idée phare.
De Rugy terne, Pinel inexistante
François de Rugy avait tout à gagner lors de ce débat. Crédité de quelque 2% dans les enquêtes d'opinion, le président du Parti écologiste n'a pourtant pas fait le coup d'éclat qui lui aurait permis de se démarquer. Clair pendant la première partie de l'émission, l'ex-EELV s'est effondré lors de sa minute de conclusion, qu'il n'a pas réussie à ramener sur son programme, se contentant de rappeler que "des projets différents ont été présentés ce soir".
Du côté de Sylvia Pinel, cela s'est nettement moins bien passé. Dès le début, la candidate du PRG est restée dans la récitation, alignant les poncifs et les formules vagues, désirant "améliorer" à peu près tout, du pouvoir d'achat à la capacité d'embauche des entreprises, sans donner une mesure concrète. Le coup de grâce est tombé lors d'un échange à mi-parcours. "L'État, demain, ce sera vous ?" l'interroge un journaliste de manière purement rhétorique. Les quelques secondes d'hésitation avant que Sylvia Pinel ne réponde étaient bien plus parlantes que son timide "oui".
Le spectacle Bennahmias
À droite, Jean-François Copé s'était chargé de l'ambiance, piques sévères et plaisanteries à l'appui. À gauche, c'est donc Jean-Luc Bennahmias qui a animé la soirée. Dans sa posture d'abord, se tenant bien moins raide que ses concurrents, faisant de grands gestes et s'adressant directement aux six autres candidats en les appelant par leur prénom.
Dans les mots, aussi, puisque le fondateur du front démocrate s'est notamment illustré en protestant contre le retard pris par les "petits candidats" dans le décompte du temps de parole. "Il va falloir un tout petit peu remettre les pendules à l'heure", s'est-il exclamé. Quelques minutes plus tard, Jean-Luc Bennahmias est tombé des nues en entendant Elisabeth Martichoux lui énoncer une mesure contenue… dans son propre programme. Réponse : "Je ne sais pas où vous avez lu ça." Ce qui l'a tout de même amené à préciser par la suite que "oui, [il a] un programme". Sa blague sur Castro et Ségolène Royal a même eu le mérite de dérider Manuel Valls.
— Philippe (@philousports) 12 janvier 2017
Si elles lui ont permis de se faire un nom, pas sûr, en revanche, que ces séquences que certains jugeront drôles et d'autres simplement hors sujet aident Jean-Luc Bennahmias à se tailler une stature présidentielle.