L'Assemblée nationale a largement adopté mardi, par 389 voix contre 37, le projet de loi de Programmation militaire 2019-2025, qui prévoit notamment un effort substantiel pour que la France porte ses dépenses de défense à 2% du PIB.
Pour "réparer et préparer", autrement dit régénérer les hommes et moderniser les équipements en préparant l'avenir, la défense doit bénéficier de 295 milliards d'euros sur ces sept ans. La majorité, appuyée par l'UDI-Agir-Indépendants qui "préfère voir le verre aux trois quarts plein qu'au quart vide" dans cette "loi de reconquête", a soutenu cette "remontée en puissance historique".
Retour en force des "États-puissances". "Les armées, qui ont su incroyablement se réformer, s'adapter, ont été soumises depuis de nombreuses années à des moyens financiers et des effectifs en très forte contraction" et "la situation ne pouvait plus durer" dans un monde aux équilibres modifiés, entre terrorisme et "retour en force des États-puissances", a plaidé Philippe Chalumeau pour LREM. Et, en Europe, il est "crucial d'envoyer le message à nos partenaires d'une France qui prend ses responsabilités", pour Fabien Lainé (MoDem).
La loi de programmation militaire, pour la période 2019 à 2025, est adoptée (votants 563, pour 389, contre 37) #LPM#DirectANpic.twitter.com/gNNQDc0B4d
— LCP (@LCP) 27 mars 2018
Malgré le partage des objectifs, LR a choisi une "abstention responsable", mettant en cause un "trompe-l'oeil" sur les 2%, l'impact des opérations extérieures voire du Service national universel malgré les assurances de la ministre des Armées. "Quand c'est flou, c'est qu'il y a un loup", a lâché Charles de la Verpillière, citant, "une fois n'est pas coutume", la socialiste Martine Aubry.
Pour la gauche, c'est une loi "du vieux monde". À gauche, les socialistes, satisfaits de la "volonté affichée" et de certains amendements, se sont aussi abstenus face à des "incertitudes" et ont espéré des annonces traduites "en actes". Insoumis et communistes ont voté contre, au nom de profondes "divergences" stratégiques martelées jusqu'au bout, notamment sur l'Otan, vue comme un outil de "l'impérialisme américain", ou l'Europe de la défense, "chimère". "Cette loi de programmation est celle du vieux monde", a clamé Alexis Corbière (LFI), exprimant un "désaccord avec cette vision manichéenne héritée de la Guerre froide". André Chassaigne (PCF) a aussi critiqué "le choix de la dissuasion nucléaire", trop onéreuse à ses yeux, plaidant pour la lutte contre la prolifération.
Hausse de 1,7 milliards par an jusqu'en 2022. Le "large" vote a néanmoins été salué dans l'hémicycle par la ministre Florence Parly, selon laquelle quasiment 27 heures de débats ont permis d'"enrichir" le texte. Sur 328 amendements déposés, 65 ont été adoptés, d'après le décompte lu par le président François de Rugy (LREM). La trajectoire d'effort budgétaire en deux étapes - une hausse de 1,7 milliard par an jusqu'en 2022, avant des "marches" de 3 milliards par an à partir de 2023 - a cependant suscité des critiques de droite et de gauche.
Ce n'est "pas crédible" et "ce sont vos successeurs qui paieront", a lancé Charles de la Verpillière (LR). "C'est le point le plus problématique", pour Joaquim Pueyo (Nouvelle Gauche). Satisfait de la "sincérité budgétaire" globale, le MoDem a glissé que cette "partie importante de l'effort sur l'après-quinquennat appelle une vigilance collective". Les pouvoirs de contrôle accordés au Parlement sur l'application de cette loi ont cependant été appréciés sur plusieurs bancs.