C’est un texte potentiellement explosif pour la majorité présidentielle. Le 9 mars arrive sur la table du Conseil des ministres le projet de réforme du code du Travail porté par Myriam El Khomri. Majoration des heures supplémentaires, plafonnement des indemnités prud’homales, référendums en entreprise, licenciement économique : les principales mesures vont dans le sens d’un assouplissement des règles qui régissent le marché du Travail. De quoi durablement diviser (une nouvelle fois) la gauche, et recourir (peut-être) au 49.3 pour faire passer la mesure. Comme un remake de la loi Macron.
Les frondeurs aux abois. Dès l’annonce des différents points du projet de loi, les frondeurs socialistes sont montés au créneau pour dire tout le mal qu’ils en pensaient. « C’est un contresens historique », critique le député de la Nièvre Christian Paul dans Libération pour qui « les annonces du ministère du Travail (…) s’apparentent à un véritable supplice chinois ». A Europe 1, le député des Français de l’étranger Pouria Amirshahi enfonce le clou : « ce projet est une forfaiture. En tout point. Et évidemment, il ne règlera rien en matière de chômage. Au contraire même ». Au Figaro, le député de Paris Pascal Cherki ironise : « la bande-annonce n’est pas attirante et ne me laisse pas présager une appréciation favorable du film ».
Que dit le PS ? Du côté du parti socialiste, l’emballement pour le projet de loi semble aussi très limité. Sur RMC/BFM, Jean-Christophe Cambadélis a affirmé qu’il aurait « du mal à voter » la réforme « dans l’état ». « Ce texte-là pour l’instant ne montre pas son équilibre entre une flexibilité et une sécurité »., explique le premier secrétaire du PS . « On ne peut pas flexibiliser le droit du travail s’il n’y a pas la sécurité ». Le MJS (Mouvement des Jeunes Socialistes), "inquiet des premières annonces sur la réforme du code du Travail, appelle de son côté le gouvernement à revoir sa copie dans un communiqué.
Le recours au 49.3 ? Le patron du PS dit attendre les discussions parlementaires mais c’était sans compter la petite phrase de la ministre du Travail dans les Echos. « Nous prendrons nos responsabilités », déclare Myriam El Khomri qui n’exclut donc pas de recourir au 49-3 pour faire passer sa réforme. « Le débat va être très nourri, car il y a un changement de philosophie important. Je le redis : nous voulons faire avancer le pays par le dialogue social, garantir davantage des droits réels et rendre les entreprises plus compétitives », explique-t-elle.
Si le gouvernement venait à passer en force sur ce texte avec le 49.3, la comparaison avec la loi Macron serait alors d’autant plus pertinente. Un recours potentiel qui met en tout cas vent debout les frondeurs. Pouria Armishahi y voit « la confirmation d’un gouvernement faible. D’une faiblesse rarement vue dans la Vème République » tandis que Christian Paul s’interroge : « Quid de la démocratie parlementaire ? »
La droite plutôt favorable. Outre le 49.3, la position de la droite sur la loi El Khomri ressemble fort à celle adoptée sur la loi Macron. « La loi El Khomri va dans le bon sens », a ainsi commenté Jean-François Copé dans Les Echos. Une formule reprise à l’identique par Yves Nicolin, le secrétaire national des Républicains en charge des PME-TPE dans un communiqué. « Je me réjouis que le gouvernement ait enfin décidé d’écouter les entreprises et de reprendre certaines propositions que nous faisons depuis plusieurs mois ».
Au groupe Les Républicains à l’Assemblée nationale, on confie : « ce qui est tout à fait possible, c’est que l’on soutienne certaines propositions et pas d’autres », en citant notamment l’assouplissement des 35 heures. Mais le possible recours au 49.3 met au moins d’accord la droite et les fondeurs sur un point. « C’est quelque chose de terrible, on s’opposera à la forme, c’est un aveu de faiblesse terrible du gouvernement », explique-t-on.