C'est par le biais d'une proposition vidée de sa substance que la réforme des retraites va refaire son apparition au Palais Bourbon jeudi prochain. La semaine dernière, la commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale a en effet rejeté l'article principal de la proposition de loi du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires (Liot) qui prévoyait l'abrogation du report de l'âge légal de départ à la retraite à 64 ans. Un vote à main levée qui a enterré les espoirs du groupe parlementaire d'annuler la mesure la plus clivante de cette réforme des retraites. Yaël Braun-Pivet, présidente de l'Assemblée nationale, indiquait même jeudi dernier, sur Europe 1, que le texte avait une "faible chance" d'être inscrit à l'ordre du jour le 8 juin prochain. Autrement dit, il pourrait ne pas être débattu dans l'hémicycle.
Un tel scénario susciterait un certain courroux dans les rangs du groupe Liot. Notamment chez le député de la Meuse, Bertrand Pancher, interrogé ce samedi sur Europe 1. "Ce n'est plus tout à fait le sujet des retraites. On voit bien que nous arrivons dans une grave crise institutionnelle si la présidente de l'Assemblée nationale ne défend pas le Parlement en faisant en sorte que notre proposition de loi puisse être débattue", a-t-il dénoncé au micro de Pierre de Vilno.
"Ce serait un précédent d'une extrême gravité"
Et de poursuivre en convoquant un argument historique. "Je vais rappeler à vos auditeurs que, depuis le début de la cinquième République, toutes les propositions de loi des parlementaires ont été débattues et ce serait un précédent d'une extrême gravité de ne pas le faire". Pour justifier sa position, Yaël Braun-Pivet a fait valoir l'article 40 de la Constitution qui interdit aux parlementaires de créer ou d'alourdir une charge publique. En l'occurrence, la proposition de loi du groupe Liot y concourrait, selon la patronne de l'hémicycle.
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Un argument "complètement fou", assure Bertrand Pancher. "Cela voudrait dire que, quand on est député, on ne peut plus présenter de proposition de loi parce qu'il y a des incidences financières. Ça ne s'est jamais vu", insiste-t-il. Le député énumère ensuite ce qu'il estime être des "mesures d'obstruction" utilisées par le gouvernement lors des débats parlementaires sur la réforme des retraites. "Ils ont dit que c'était une loi de finance - alors que c'était contestable - et donc limitée dans le temps. Ensuite il y a eu un vote bloqué au Sénat, après un 49.3... Tout ça était légal mais franchement pas exemplaire en termes de démocratie (...) on se demande à quoi sert le Parlement", a-t-il fustigé.
La réforme des retraites est donc bel et bien de retour sur le devant de la scène puisque 48h avant l'arrivée de cette proposition de loi à l'Assemblée, aura lieu une 14e journée de mobilisation. Selon les informations d'Europe 1, entre 400.000 et 600.000 manifestants sont attendus partout en France.