Parmi ses premiers déplacements après sa réélection, Emmanuel Macron a choisi de se rendre à Marseille ce jeudi, en compagnie de son nouveau ministre de l'Éducation nationale, Pap Ndiaye, pour visiter une "école du futur". Le chef de l'État y a affirmé que lors du prochain quinquennat, "le socle qu’on a bâti ces 5 dernières années sera consolidé". Pour l'éditorialiste d'Europe 1 Nicolas Beytout, directeur du journal L'Opinion, cette première visite couplée avec la révélation sur les tenues islamistes à l'école vont permettre d'en savoir davantage sur le profil du successeur de Jean-Michel Blanquer.
Pap Ndiaye, un personnage très maîtrisé
En regardant Emmanuel Macron faire cette déclaration, flanqué de son tout nouveau ministre de l’Éducation, Pap Ndiaye, qui pense grosso modo le contraire de Jean-Michel Blanquer sur bien des points, on guettait le visage de celui qui prend les rênes de l’Éducation nationale. Pas un signe, pas un frémissement, tout juste quelques légers hochements de tête, mais rien d’ostensible. Aucun doute n’est possible, à défaut d’être un homme politique expérimenté, Pap Ndiaye est un personnage très maîtrisé.
Le problème, c’est que l'on cherche toujours la raison profonde pour laquelle ce professeur d’histoire a été nommé à ce poste. Fallait-il un profil de gauche pour draguer le vote mélenchoniste des profs et les ramener vers les terres macronistes ? Est-ce parce qu’un ministre catalogué à gauche aura plus de facilité à faire avaler la pilule de la réforme de l’école voulue par Emmanuel Macron ? En tout cas, sur ce point, la volonté du président réélu semble intacte : comme il l’avait dit pendant sa campagne électorale, l’expérience lancée à Marseille après la rentrée de septembre l’an dernier sera étendue progressivement à toute la France.
Dans les écoles (et seulement les écoles pour l’instant), les directeurs d’établissements acquerront une certaine autonomie pour recruter leurs enseignants et pour tester des méthodes nouvelles, inspirées (c’est l’objectif) par la base et non pas insufflées depuis le sommet. Rien de bien méchant, en réalité, mais le mot "autonomie" fait figure d’épouvantail à la population des profs, plus attachée à tout moyenner plutôt qu’à individualiser.
Les tenues islamiques à l'école, un révélateur de la pensée de Ndiaye
Le journal L'Opinion a révélé jeudi que l’Éducation nationale est confrontée à une épidémie de tenues islamiques portées par des élèves, filles ou garçons, qui veulent ostensiblement afficher leur posture religieuse. Et comme le mouvement prend de l’ampleur, comme on le voit surgir peu de temps après l’affaire des burkinis dans les piscines municipales de Grenoble, cette affaire ne ressemble pas du tout à un hasard. Et nul doute que ce sujet va servir de révélateur de la pensée réelle de Pap Ndiaye.
Lorsqu’il était enseignant ou dirigeait Musée de l’Immigration (son dernier poste avant de rejoindre le ministère), il a signé plusieurs écrits sur l’existence d’un "racisme structurel en France" ou sur le wokisme, qu’il s’est attaché à banaliser. Que fera-t-il, que dira-t-il sur ces sujets, maintenant qu’Emmanuel Macron, réagissant à cette information, a affirmé qu’il voulait la clarté et la vérité pour mesurer l’importance de ce phénomène, et que la loi de la République serait appliquée : pas de signe religieux quel qu’il soit dans nos écoles. Ce sera intéressant à observer.
Mais c’est tout de même inouï de penser que nous ne sommes plus qu’à une semaine des législatives, et qu’on se demande toujours sur de nombreux dossiers ce qu’Emmanuel Macron veut vraiment faire. Il n’y a pas eu de campagne, ni pour la présidentielle ni pour les législatives, et un des seuls points sur lesquels le président sortant avait été clair, la retraite à 65 ans, il est en train de reculer, avec des positions de plus en plus floues.
Les principaux membres du cabinet de Borne marqués à gauche
Disposons-nous d'indices ? Oui, on peut les dénicher un à un, tous les jours enfouis dans les lignes grises du Journal officiel. C’est la publication des noms des membres des cabinets ministériels, c’est-à-dire des équipes de hauts-fonctionnaires qui viennent au-dessus des administrations pour épauler le ministre dans ses choix politiques et la mise en œuvre de sa politique. Le profil d’un cabinet ministériel dit en général beaucoup de ce que veut faire le ou la ministre.
Or que voit-on ? Que là où Edouard Philippe s’était entouré de collaborateurs de droite, les principaux membres du cabinet d’Elisabeth Borne sont tous clairement marqués à gauche. Ils ont tous servi pendant le quinquennat Hollande, et ont tous un épais vernis social ou écolo. Ce que veut Macron ? Après le "et de droite", ça pourrait bien être le tour de "et de gauche".