C'est un coup de théâtre qui met fin à un véritable feuilleton politico-médiatique. Marine Le Pen a annulé jeudi, quelques heures avant le début de l'émission, sa participation à Des paroles et des actes sur France 2. Le torchon a brûlé toute la journée entre la patronne du FN et la chaîne publique, mais les causes de ce psychodrame sont plus anciennes. Europe 1 refait le film.
• Marine Le Pen pose ses conditions
Dès le début, les négociations sont tendues entre France 2 et Marine Le Pen. Comme le révèle L'Obs début octobre, la présidente du Front national - et candidate aux élections régionales en Nord-Pas-de-Calais-Picardie - refuse plusieurs personnalités proposées par la chaîne pour venir lui porter la contradiction sur le plateau. Daniel Cohn-Bendit, Valéry Giscard d'Estaing, Robert Badinter, Jean-Marie Le Guen… Aucun ne fait l'affaire aux yeux de l'eurodéputée. Ce sont finalement le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll, et le président de l'UDI, Jean-Christophe Lagarde, qui sont choisis pour croiser le fer avec elle.
• Xavier Bertrand proteste
Tête de liste Les Républicains aux régionales dans kle Nord, Xavier Bertrand s'indigne de l'exposition médiatique de son adversaire frontiste. Le député écrit le 15 octobre une lettre à la patronne de France Télévisions, Delphine Ernotte, puis à la ministre de la Culture, Fleur Pellerin, pour exiger "un traitement équitable des candidats". "Marine Le Pen est la star des médias", s'insurge Xavier Bertrand sur Europe 1, le 17 octobre.
• Cambadélis et Sarkozy s'insurgent, le CSA s'en mêle
C'est la veille de l'émission que la polémique prend de l'ampleur. Jean-Christophe Cambadélis propose à Nicolas Sarkozy de saisir le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). L'ancien chef de l'Etat, qui refusait de prendre le premier secrétaire du PS au téléphone en janvier dernier, accepte cette fois volontiers de converser avec lui. Les deux hommes sont d'accord : pour eux, l'absence de débat entre Marine Le Pen et ses adversaires aux régionales constitue "une violation manifeste de la règle républicaine de l'équité du temps de parole", comme l'explique l'entourage de Nicolas Sarkozy. Dans l'après-midi, le CSA ajoute son grain de sel, appelant les télévisions à offrir "la possibilité d'une expression contradictoire" aux concurrents des "personnalités fortement impliquées dans la compétition électorale".
• France 2 modifie son émission
Face à ces pressions, France 2 choisit finalement de faire intervenir dans l'émission Xavier Bertrand et Pierre de Saintignon, tête de liste socialiste aux régionales dans le Nord. Ce débat viendra s'ajouter aux face-à-face déjà prévus. La chaîne informe Marine Le Pen tard dans la soirée de mercredi, ce dont la présidente du FN se scandalise. Invitée d'Europe 1 jeudi midi, elle dénonce un "amateurisme total" de France 2, tout en assurant qu'elle maintient sa participation à l'émission.
• Marine Le Pen se décommande
Sur son compte Twitter, Marine Le Pen poursuit ses récriminations contre France 2. "Ils me prennent pour leur chien ?", écrit-elle rageusement. Avant de faire volte-face, à 17h50 précisément. Dans un communiqué, la patronne du FN annonce qu'elle ne participera finalement pas à Des paroles et des actes. Dénonçant une "mascarade" ainsi qu'une "méthode cavalière et méprisante", elle fustige les "caprices du système UMPS". "L'amateurisme et la servilité de M. Pujadas ont transformé aujourd'hui l'organisation de cette émission en véritable pantalonnade", ajoute-t-elle à l'adresse du présentateur de l'émission. "Marine Le Pen a changé d'avis, nous le regrettons", déclare quant à lui David Pujadas sur Europe 1, en assurant que "rien n'a été imposé" à la présidente du FN.