Le candidat Éric Zemmour est estimé entre 12 et 14% dans les sondages, pourtant, il semble être le candidat qui remplit le plus de salles. De là à penser, comme certains pontes LR et Reconquête, qu’il y aurait un vote caché pour l’ancien journaliste du Figaro ? Selon le directeur général de l’IFOP, Frédéric Dabi, c’est peu probable.
Les enquêtes sont désormais faites en ligne et non plus par téléphone
Pour le sondeur, il y a une grande différence entre les déclarations d’intention de vote pour Jean-Marie Le Pen il y a quelques décennies, et celles d’Éric Zemmour aujourd’hui : "Les enquêtes étaient faites par téléphone, et les personnes n’osaient pas dire aux enquêtrices et enquêteurs de l’IFOP, qu’elles allaient voter Jean-Marie Le Pen". Les sondages sont désormais réalisés en ligne, à partir de panels. Une méthode qui permettrait, selon le sondeur, d’assumer plus facilement son vote. "On a du mal à imaginer qu’un interviewé devant sa tablette ou son smartphone se mente à lui-même et minimise un vote Zemmour", souligne-t-il sur Europe 1.
Des difficultés à calculer le potentiel électoral d’un candidat nouveau ?
Autre interrogation qui taraude l’entourage des aspirants à l’Élysée, la capacité des instituts à être précis pour des candidats sans antécédents électoraux comme Éric Zemmour. Une inquiétude balayée par Frédéric Dabi, il en veut pour preuve la dernière élection présidentielle. Les instituts ne se sont pas trompés sur le score d’Emmanuel Macron en 2017. Le candidat "En Marche" était alors dans une situation similaire à celle d’Éric Zemmour aujourd’hui, il avait un parti récent, et sa candidature était nouvelle dans le paysage politique. A l’IFOP, ils obtiennent leurs estimations en calculant en fonction des électorats : "On regarde électorat par électorat, Éric Zemmour puise dans deux sources, un gros quart Marine Le Pen 2017, et 25% François Fillon", précise Frédéric Dabi.
Une décorrélation entre les salles remplies et les résultats électoraux
13.000 personnes à Villepinte, 4.500 à Cannes, 7.000 à Lille le week-end du 5 février, Eric Zemmour remplit les salles. Mais ce n’est pas pour autant que cela se traduit en intentions de vote, ou qu’il y aurait un vote caché. Pour Frédéric Dabi, "il n’y a vraiment pas de corrélation entre meeting rempli et un succès électoral" et le sondeur en veut pour preuve les meetings de Ségolène Royal, ou ceux de Nicolas Sarkozy en 2016. L’ancien président de la République avait des salles très ferventes, mais n’a pas réussi à se qualifier au second tour de la primaire : "On n’est pas du tout sur la même échelle, entre 46 millions d’électeurs inscrits et une salle plus ou moins bien remplie".
Une dynamique Zemmour mais des hésitations entre les candidats de droite
Mais cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de dynamique Zemmour. Selon le sondeur, "il est à un niveau élevé, à 3 ou 4 points du second tour, dans un contexte où la campagne n’a pas vraiment commencé, compte tenu de l’absence du président de la République et du Covid qui fige les choses". Mais le plus frappant pour Frédéric Dabi, c’est la fluidité électorale des votants pour François Fillon en 2017 : "Une partie est chez Emmanuel Macron, une partie chez Valérie Pécresse, l’autre chez Éric Zemmour. Compte tenu de l’hésitation que l’on voit dans nos enquêtes quotidiennes [NDLR : le "rolling" réalisé par l’IFOP pour nos confrères de Paris Match], entre un vote Pécresse et un vote Zemmour, entre un vote Zemmour et un vote Le Pen, tout est permis".