La journée de mobilisation des enseignants, mardi, n'y a rien fait : le décret ainsi que l'arrêté portant sur la réforme du collège sont parus mercredi au Journal officiel. Une célérité qui agace les syndicats et met en colère les leaders de l'opposition, qui crient au "passage en force".
Un "coup de force" pour Sarkozy. "Il s'agit avant tout d'un coup de force", dénonce Nicolas Sarkozy dans une interview à paraître jeudi dans Le Figaro. "C'est le contraire de la méthode qui devrait prévaloir dans une République moderne digne de ce nom", poursuit le président de l'UMP. "Il est inadmissible que la représentation nationale n'ait pas son mot à dire sur un sujet aussi central, qui concerne tous les Français". Et l'ancien chef de l'Etat de dénoncer "le mépris dont François Hollande et Manuel Valls ont choisi d'user contre tous ceux qui contestent leur action".
"C'est ce genre de gestes qui fait flamber l'indignation". François Bayrou est le premier à être monté au créneau. Sur Europe 1, le leader du MoDem, "choqué" par l'attitude du gouvernement, a appelé à une "manifestation nationale". "Il y a des inquiétudes et on décide, par un geste d'autoritarisme de petit chef, de publier le décret au Journal Officiel. Il croit que ça sera fini mais il se trompe. C'est ce genre de gestes qui fait flamber l'indignation", a estimé l'ancien ministre de l'Education nationale du gouvernement Balladur.
Figure de la fronde dans son camp, le député Bruno Le Maire, à l'initiative d'une lettre ouverte demandant le retrait du texte, a lui aussi exprimé son mécontentement, sur Twitter :
Ce passage en force renforce ma détermination à combattre la #ReformeCollege avec les 300 parlementaires et 26000 signataires de mon appel.
— Bruno Le Maire (@Bruno_LeMaire) 20 Mai 2015
Un "profond mépris" du gouvernement. Plus tôt dans la journée, la numéro deux de l'UMP, Nathalie Kosciusko-Morizet, lui avait emboîté le pas, assurant que la publication de la réforme révèle un "profond mépris" du gouvernement dont "la parole ne vaut rien". "D'une main, Najat Vallaud-Belkacem annonce qu'elle est ouverte à la discussion, le lendemain elle publie au Journal officiel. (…) Ce mépris envoyé à la tête des Français" va "bien au-delà de la seule question de cette réforme du collège. C'est le sectarisme socialiste contre la société", a-t-elle déclaré, avant d'espérer que sa famille politique s'empare du sujet afin de "trouver la bonne formule qui permettra de fédérer toutes les oppositions sur le fond et tous ceux qui sont scandalisés sur la manière de procéder"
Interrogé par France Inter, François Fillon a appuyé les critiques de ses petits camarades de l'UMP : "il y a un passage en force. Il faut que la communauté éducative trouve les moyens de réagir. (…) C'est une mauvaise réforme" et "je ne crois pas du tout que le gouvernement puisse aller jusqu'au bout". Christian Jacob, chef de file des députés UMP, a quant à lui réclamé l’abrogation du décret et "la tenue dans les plus brefs délais d'un véritable débat démocratique, projet contre projet". "Publier ce décret cette nuit est un acte politique brutal, vous le paierez cher M. le Premier ministre", a-t-il lancé à Manuel Valls lors de la séance des questions à l'Assemblée nationale.
Le gouvernement réplique. Parce qu'ils avaient anticipé les critiques à venir, plusieurs membres du gouvernement se sont relayés dans les médias, mercredi matin, pour assurer le service après-vente de leur décision. Invitée de France Info, la ministre de l'Éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem, a ainsi fait valoir une "préparation en amont de tous les établissements qui seront amenés à appliquer le texte". "Les délais sont respectés tels qu'ils étaient prévus. Il est désormais temps de passer à l'étape suivante", a-t-elle assuré. "Cela fait plusieurs mois que la ministre travaille sur cette réforme (...) ambitieuse, pour l'égalité et pour l'excellence. Elle l'a expliquée et explicitée longuement", a enchaîné Christiane Taubira sur France 2.
La ministre de la Culture Fleur Pellerin n'a pas dit autre chose sur Europe 1 : "la caravane passe car la réforme est nécessaire", a-t-elle estimé, assurant que "les opposants ont été entendus puisque la ministre a décidé de confier un certain nombre de missions au Conseil national des programmes".