Attendu depuis plusieurs jours, le remaniement a finalement eu lieu vendredi. Après la passation de pouvoir entre Edouard Philippe et le nouveau Premier ministre Jean Castex dans l'après-midi, un nouveau gouvernement devrait être annoncé avant mercredi, lançant le "nouveau cap" de la suite du quinquennat d'Emmanuel Macron. Selon Benjamin Morel, maître de conférences en Droit public à l'université Paris II et politologue, l'enjeu de la nomination d'un nouveau Premier ministre était justement pour Emmanuel Macron de "reprendre la main sur Matignon".
"Remettre la main sur la machine administrative"
"Du point de vue d'Emmanuel Macron, l’un des enjeux de ce remaniement, c’était de reprendre la main sur Matignon", analyse Benjamin Morel, qui rappelle au passage que "le pouvoir administratif n’est pas à l'Élysée, mais à Matignon." Selon lui avec la nomination de Jean Castex, "il y avait cette volonté" du pouvoir politique "de remettre la main sur la machine administrative".
Le politologue n'est toutefois pas certain que le choix est "intelligent d'un point de vue électoral", car l'électorat LREM et de centre-droit, qui "à 90% voulait qu'Edouard Philippe reste" pourrait reprocher au Président son départ. "Le dernier précédent comparable, c’était François Mitterrand avec Michel Rocard, et le premier ne s’est jamais remis, d’un point de vue sondagier, du départ de Michel Rocard", rappelle Benjamin Morel.
Conserver une majorité parlementaire
Pour le professeur le choix n'est en tout cas pas anodin : Jean Castex est "un homme qui très clairement sait tenir l’Etat", estime-t-il, qui met en avant son "côté homme de terrain, conseil départemental et maire" et qui "sait tenir cette machine administrative". Mais qui en revanche n'a pas le bagage "parlementaire".
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"Il déporte qui plus est la majorité sur sa droite, ce qui va probablement jouer dans les prochaines semaines", décrypte Benjamin Morel, car la République en marche n'a plus de majorité parlementaire seule. Or, "l'un des enjeux pour Emmanuel Macron dans ces deux ans à venir, c'est de conserver sa majorité parlementaire, qui penche plutôt à la gauche de LREM et est une majorité très friable. Et pour cela, Jean Castex n'est peut-être pas le meilleur choix."
"Ceux qui ont les clés en mains des prochains scrutins" est "plutôt l'électorat de centre-droit, très mobilisable, composé de personnes âgées et de CSP+", ajoute le politologue. "L'électorat écologiste est plus divers, plus difficile à capter", c'est pourquoi Emmanuel Macron a probablement misé sur ce nouveau Premier ministre.