Pour lui, c'est un véritable "poison". Si le psychiatre Patrick Lemoine est aussi véhément envers les somnifères, c'est que ces médicaments n'ont, selon lui, aucune vertu sur le long terme. Dans son dernier ouvrage, Docteur, j'ai mal à mon sommeil (éditions Odile Jacob), le docteur en neurosciences démontre qu'ils n'apportent pas le sommeil promis aux patients en proie à l'insomnie. Leur utilisation serait donc contre-productive, au contraire de certaines plantes, qui trouvent grâce à ses yeux de clinicien.
Un somnifère n'apport "pas de vrai sommeil"
Patrick Lemoine est même catégorique : "Ça n'existe pas, les somnifères. Le mot 'somnifère' est une escroquerie intellectuelle, un abus de langage. Moi, si j'enregistre quelqu'un qui a pris un 'somnifère', il ne dort pas. C'est une anesthésie légère, rien de plus. Ce n'est pas du vrai sommeil." Et c'est précisément la raison pour laquelle "les gens qui dorment soi-disant sous somnifères sont fatigués", appuie-t-il. Un véritable problème, alors que les ventes de somnifères "ont augmenté d'un tiers" depuis un an, assure le spécialiste.
De plus, "il est montré qu'au bout de trois semaines, le somnifère n'entraine même plus cette perte de conscience, cette anesthésie", poursuit le docteur en neurosciences. "Ça ne marche plus, mais les gens disent 'si, je vous assure, je dors bien, ça fait des années que je dors'. Moi, je les enregistre et je leur dis 'non, vous ne dormez pas'."
"Amnésie de l'insomnie"
Comment expliquer ce décalage entre le ressenti et l'impact réel du médicament ? "L'effet sédatif soporifique du somnifère s'épuise en 2 ou 3 semaines. Mais l'effet amnésiant ne s'épuise jamais. Ça nous fait oublier qu'on ne dort pas. C'est une amnésie de l'insomnie." Et la balance bénéfice/risque du somnifère se dégrade même lorsqu'on pense à leurs effets sur le long terme : "Il y a des études qui montrent que la mortalité augmente nettement si on en prend. Ça provoque beaucoup d'apnées du sommeil, donc de l'hypertension, donc des infarctus et des AVC ou Alzheimer, si on ne meurt pas."
" Avec la mélatonine à libération prolongée, il y a très peu d'interactions médicamenteuses "
Le psychiatre préfère prescrire aux insomniaques de la "mélatonine à libération prolongée". "Elle va couvrir toute la nuit et aide beaucoup. Il n'y a quasiment pas de contre-indication. Et à moins de la prendre à 5 heures du matin et de prendre la route juste après, c'est pratiquement sans danger et il y a très peu d'interactions médicamenteuses", détaille Patrick Lemoine.
De manière plus naturelle, certaines plantes ont de véritables vertus apaisantes et peuvent donc être des alliées pour s'endormir plus facilement. C'est notamment le cas de la camomille et du tilleul, même s'il n'y a "pas de démonstration scientifique" pour ces dernières. "En revanche, il y a des plantes comme la valériane, le pavot de Californie ou la passiflore pour lesquelles il y a des études très bien faites, notamment la valériane et la passiflore. À tel point que la passiflore a une autorisation de mise sur le marché (AMM) européenne."
L'utilité du zinc
Patrick Lemoine conseille également "la rhodiole, un tranquillisant dans la journée, mais qui permet de préparer sa nuit" quelques heures plus tôt. "Si vous avez une insomnie dépressive, l'association de safran et de rhodiole" est bienvenue, avec "des démonstrations scientifiques" pour étayer cet effet. "Il y avait une étude faite par le CNRS qui a comparé le Prozac et le millepertuis. C'est le millepertuis qui a gagné", en termes de lutte contre dans la dépression.
Mentionnons enfin l'apport du zinc, qui peut lui aussi permettre de mieux dormir, selon le psychiatre. "En plus, c'est aussi bon contre le Covid puisque c'est aussi immuno-stimulant. Des études montrent qu'en cas de carence en zinc, on dort moins bien et qu'en cas de supplémentation en zinc, on dort mieux", conclut-il.