Une psychothérapeute recalée car elle sentait le tabac a porté plainte contre l’employeur. Pour elle, être écartée d’un poste à cause d’une odeur est insupportable. "Quelqu’un qui n’a pas les moyens de se laver facilement mais qui cherche quand même un travail, s’il sent des pieds ou s’il sent de la bouche parce qu’il n’a pas pu s’acheter un chewing-gum, il n’aura pas le boulot ? Je trouve ça tellement nul, c’est grave", s'insurge-telle au micro d’Europe 1.
Illégale selon la loi (article L1132-1 du code du travail), la discrimination à l’embauche est pourtant présente à tous les niveaux de l’entreprise et touche quasiment tous les salariés. De l’employé au cadre, de l’homme à la femme, du jeune au sénior, personne malheureusement, n’échappe au phénomène.
Pourtant la loi est claire : "Aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement (…) ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire (…) en raison : de son sexe, de son origine, de ses mœurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de son appartenance ou de sa non appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son patronyme, de son état de santé ou de son handicap, de ses caractéristiques génétiques".
Au-delà de ces critères bien précis définis par la loi, la discrimination peut prendre des formes inattendues. Appartenir à une association ou diffuser des informations sur les réseaux sociaux sont des critères qui peuvent être utilisés contre le candidat, "ce qui revient à de la discrimination indirecte", décrypte maître Ouaissi, spécialiste du droit du travail et maître de conférences à l’université Paris Dauphine.
Activité associative - Etre actif au sein d’une association peut parfois desservir le candidat. A travers l’activité, le nom de l’association, l’employeur peut connaître les préférences du candidat pour une cause ou une autre. Pour maître Ouaissi, "les employeurs qui demandent pour quelle association vous vous impliquez peuvent s’en servir pour connaitre vos accointances politiques ou religieuses. Cela revient à de la discrimination indirecte". En effet, il est interdit par la loi d’écarter un candidat en raison de ses opinions politiques ou de son appartenance, ou non, à une religion.
Les odeurs - L’odeur ne fait pas partie des critères légaux définis par la loi comme étant discriminants. Mais elle peut faire partie des critères indirects avancés par maître Ouaissi. "Les critères de discrimination ne sont pas fermés. Beaucoup d’éléments peuvent être considérés comme de la discrimination à partir du moment où il y a une différence de traitement entre deux candidats qui n’est pas objective", prévient-il. Il est donc difficile de prouver qu’un poste n’a pas été attribué à une personne qui aurait une odeur corporelle particulière. Néanmoins, cela peut passer pour de la discrimination, à condition de le prouver.
Réseaux sociaux - En 2011, 38 millions de Français utilisent Internet. Parmi eux, on compte 23,2 millions de profils Facebook. Il est donc assez simple pour un employeur d’aller fouiller dans la "vie" d’un candidat et, finalement, refuser de l’embaucher à cause de photos ou de discussions. "Cette démarche peut s’apparenter à de la discrimination, mais il faut alors pouvoir le prouver, ce qui est très difficile", confie maître Ouaissi.
Femmes enceintes - Les discriminations sur le sexe peuvent, elles aussi, être parfois difficiles à déceler. Si la différence de salaires entre homme et femme est la plus flagrante des discriminations, d’autres se font plus discrètes. Ainsi, explique Maître Ouaissi, "une enseigne de grande distribution ayant supprimé les fauteuils des caissières après avoir remarqué qu’elles étaient plus productives discrimine directement les femmes enceintes". En effet, avec ce type de critères, les femmes enceintes ont moins de chance d’être embauchées puisque la position debout leur est déconseillée.