Le littoral français s'organise avant les grandes marées

© AFP
  • Copié
Victor Dhollande-Monnier, François Coulon et AFP , modifié à
SUR LE PIED-DE-GUERRE - La "marée du siècle" prévue pour le 21 mars prochain oblige certains villages à prendre des mesures exceptionnelles. 

Les sacs de sable et les gros cailloux sont de sortie sur certaines communes littorales de l'ouest de la France. Vendredi marque en effet  le début d’une série de grandes marées sur les côtes ouest françaises. La "marée du siècle" est même attendue pour le 21 mars prochain. Certains villages ont donc prévu des dispositifs exceptionnels. Et les habitants ne sont pas toujours très rassurés.

Grosse inquiétude à Saint-Jean-le-Thomas. "Je suis inquiet", confie le maire de Saint-Jean-le-Thomas Alain Bachelier. "Nous avons mis en place un dispositif exceptionnel, avec plus d'une centaine de sacs de sable au pied de la dune pour la conforter. Mais la nature est forte". Dans ce petit village, près de 140 maisons construites sous le niveau de la mer sont extrêmement menacées ce week-end.

ILE-DE-SEIN

Des niveaux d’eau très préoccupants. Cette petite commune de Saint-Jean-le-Thomas se trouve dans la baie du mont Saint-Michel. Elle connaît les plus fortes variations de hauteurs d'eau en France. Samedi, le niveau de l'eau va ainsi y monter de près de 15 mètres contre cinq mètres par exemple à Saint-Gilles-Croix-de-Vie (Vendée). L'impact de cette montée dépend de la météo, en particulier des vents. 

>> LIRE AUSSI - A-t-on bien tiré les leçons de Xynthia ?

Des coefficients qui reviennent tous les 20 ans. C'est tout un cycle de marées hautes, qui ne revient que tous les 20 ans environ. Le coefficient de marée va ainsi monter à 118 vendredi soir et 119 le 21 mars. Au total, le coefficient sera supérieur à 100 pendant quarante jours en 2015. Si certains élus sont plus que jamais sur le pied de guerre, c'est qu'en 20 ans la côte s'est érodée. A Saint-Jean-le-Thomas, la mer arrive désormais à 30 mètres des habitations. Dans son ensemble, la côte ouest du département de la Manche est l'une des plus fragiles de France en termes d'érosion.             

Barrage gonflable sur l’île d’Oléron. De nombreuses autres communes littorales ont aussi disposé des sacs de sable sur leurs zones les plus fragiles, comme Saint-Gilles-Croix-de-Vie ou Biarritz (Pyrénées-Atlantiques). Sur l'île d'Oléron, en Charente-Maritime, c'est un barrage gonflable de 700 mètres de long qui a été mis en place le long d'un chenal en prévisions des fortes marées.

Des habitants obligés de déménager. Ce week-end, Bernadette sera, elle aussi, sur le pied-de-guerre. Sa petite maison est à quelques mètres de la plage Normande des Pieux. Elle va devoir la quitter pour raisons de sécurité. Même si cette petite bicoque en bois résiste aux éléments depuis plus de 60 ans, la mairie la contraint à aller dormir ailleurs à chaque grande marée. "Quand la mer devient mauvaise, elle devient mauvaise", résume de manière assez manichéenne l’adjoint au maire André Peronel. "S’il y a des vagues de 8 mètres, la maison ne résistera pas 20 secondes. On lui demande donc de quitter les lieux parce qu’il y a un danger grave et imminent pour elle".

A 85 ans, Bernadette a fait ses comptes. En 2015, elle va devoir découcher à 49 reprises. "Depuis un an, je suis obligée de payer ailleurs pour me loger. Ça fait cher, surtout avec ma petite retraite", déplore-t-elle au micro d’Europe 1. Malgré le vent et les vagues, elle a moins peur dans cette vieille bicoque. "Moi, je me sens davantage en sécurité ici, malgré la mer. Ça fait 24 ans que j’habite ici". En 20 ans, la mer a avancé de 15 mètres et Bernadette dénonce l’immobilisme des autorités. "Rien n’a été fait. La mer grignote de jour en jour la route. Si ça continue, je ne pourrais même plus rentrer chez moi. Ça me révolte mais j’ai envie de me battre jusqu’au bout".