Faut-il allonger les délais de prescription en matière de crime sur mineur ? L'animatrice Flavie Flament, qui a récemment révélé avoir été violée lorsqu'elle était adolescente, et un magistrat ont débuté vendredi une mission "de consensus" pour essayer de faire avancer un sujet qui fait débat.
Conclusions attendues fin mars. Confiée par la ministre des Familles, de l'Enfance et des Droits des femmes, Laurence Rossignol, cette "mission de consensus sur les délais de prescription applicables aux crimes sexuels commis sur les mineurs" va durer trois mois. Ses conclusions sont attendues fin mars. Ce "travail inédit", selon Laurence Rossignol, devra "faire se confronter au travers de tables rondes, de débats et d'auditions des points de vue différents, des disciplines différentes pour réfléchir ensemble", a-t-elle expliqué vendredi.
Actuellement, une prescription de 20 ans pour les viols sur mineurs. Actuellement, la prescription pour les viols sur mineurs est de 20 ans après la majorité de la victime, de dix ans pour les agressions sexuelles. Réclamé depuis de nombreuses années par des associations, l'allongement de ce délai à 30 ans pour les crimes, voire leur imprescriptibilité, a refait débat à l'automne après la parution du livre de l'animatrice Flavie Flament. Dans La consolation (Ed. Lattès), elle révèle avoir été violée par un célèbre photographe il y a près de 30 ans, un délai trop long pour déposer plainte, et plaide pour que "ceux qui dorment tranquilles" répondent de leurs actes devant la justice.
"Si j'avais pu confondre mon violeur dans un cadre légal, je l'aurais fait". Quelques semaines après la publication de l'ouvrage, forte du témoignage d'autres femmes, Flavie Flament a dévoilé publiquement l'identité du photographe, David Hamilton, qui a nié les faits. Il a été retrouvé mort fin novembre à son domicile parisien et la piste d'un suicide est privilégiée. "Si j'avais pu confondre mon violeur dans un cadre légal, je l'aurais fait. Dans mon cas personnel, je n'avais pas d'autre choix, j'ai organisé une sorte de jugement public", a dit Flavie Flament, dont les souvenirs ont resurgi il y a peu. "Quand on est dans une posture de victime, on ne comprend pas ce couperet du délai de prescription. Cette mission va me permettre de pouvoir me confronter aux différents points de vue sur la question", a-t-elle ajouté.
Six victimes de viols sur dix sont mineures. Flavie Flament codirige la mission avec Jacques Calmettes, magistrat, président de la cour d'assises des Bouches-du-Rhône et ancien président de l'Institut national d'aide aux victimes et de médiation (Inavem). Dans un récent rapport, le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCE), qui préconise l'allongement des délais de prescription, indiquait que 60% des victimes de viol sont mineures. Malgré des propositions de loi déposées en ce sens en 2014 et en 2016, le Parlement n'a pas bougé sur la question. "Il n'y aura pas de traduction législative dans la mandature, les délais sont trop serrés", a prévenu Laurence Rossignol, espérant "laisser une ressource supplémentaire pour éclairer un débat qui va forcément revenir, et améliorer la prise en charge des victimes de viol".