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Clémence Olivier , modifié à
À 41 ans, Marc a bouleversé toute sa vie. Il a quitté son travail à Montréal et décidé de s'installer sur l'île d'Oléron pour devenir facteur. Au micro d'Olivier Delacroix vendredi, il explique comment il a traversé cette crise de la quarantaine.
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Marc, 52 ans, a fait une "crise de la quarantaine". À 41 ans, il a ressenti le besoin de chambouler toute sa vie, de quitter son travail dans la publicité mais aussi la ville de Montréal où il était installé depuis plusieurs années pour revenir s'installer dans l'île de son enfance, l’île d'Oléron. Vendredi, au micro d'Olivier Delacroix sur Europe 1, il revient sur cette période compliquée pour lui comme pour son entourage et il confie sa fierté de l'avoir surmontée.

"La crise de la quarantaine, je ne voyais pas vraiment ce que ça pouvait symboliser. Mais à l'aube de mes 40 ans, j'ai perdu mon père et cela a été le déclencheur de tout un tas de choses. J'avais le sentiment de me retrouver tout seul, un peu orphelin car je n'ai pas de frères et sœurs et ma mère était morte quelques années auparavant. L'année d'après, cela s'est traduit concrètement, j'ai commencé à tout remettre en question : ma vie personnelle, sociale et professionnelle, mais aussi la façon dont je me voyais, le sens que je donnais à ma vie. Tout était sujet à remise en question.

En fait, c'était comme si je me réveillais d'un rêve et que je me trouvais dans un cauchemar. J'avais l'impression de pas faire les bonnes choses, de ne pas être au bon endroit, ni avec les bonnes personnes, que tout ce que je voyais ne correspondait plus à mes aspirations. Je sentais un profond décalage de tout par rapport à moi. Et cela ne concernait pas uniquement un point précis dans ma vie, je me sentais mal sur tout.

J'avais le sentiment d'étouffer, je me sentais trop jeune pour considérer que j'avais fait ma vie et que je devais rester là où j'avais commencé à être et en même temps trop vieux pour pouvoir me permettre de recommencer quelque chose de nouveau.

Marc décide alors de déménager et de quitter Montréal

J'ai eu besoin de changer quelque chose. La première étape, ça a été un déménagement. J'ai quitté le Canada et je suis revenu en France dans la maison familiale sur l'île d'Oléron. Je suis passé d'une grande ville à une petite île. En faisant ça, j'ai laissé tous les gens que je connaissais.

Le deuxième élément qu'il a fallu que je change radicalement a été mon métier. Je travaillais dans la publicité. Et j'avais l'impression d'avoir fait le tour de ce travail. J'ai choisi de devenir facteur. Je suis passé d'un métier très impliquant à quelque chose de plus simple. Une fois que l'on a fini son boulot on rentre chez soi et on n'a plus beaucoup de choses à penser. Ça m'a fait du bien.

Seul son compagnon n'a pas changé

La seule chose que je n'ai pas eu à remettre en doute, c'est ma vie sentimentale. J'en suis content car cela aurait été une catastrophe pour moi. Mon compagnon a toujours été à mes côtés même s'il a été très malheureux au départ de me voir ainsi. D'ailleurs quand je lui ai dit que j'avais besoin de quitter le Canada, ça a été dur mais il m'a dit 'on y va'.

Aujourd'hui, je n'ai strictement aucun regret. Je ressens même une certaine fierté, malgré tout ce que j'ai vécu, d'avoir réussi à passer à travers et d'avoir identifié que ce que je vivais n'était pas quelque chose d'unique. Pour moi, ce n'est pas un échec.

Pour surmonter la crise ? Il faut s'écouter

Je ne sais pas s'il y a des conseils à donner. Je ne suis pas persuadé que la crise de la quarantaine soit quelque chose que l'on identifie quand ça nous arrive. D'ailleurs je ne crois pas que c'est forcément à 40 ans que ça survient, ça peut arriver plus tôt, ça peut arriver à 50 ans, voire un peu plus tard.

Je pense que quand on sent que l'on a un besoin de changement, quand on ne se sent pas forcément à sa place, qu'on a l'impression que l'on est pas légitime, il faut essayer de prendre un peu de recul et quand c'est possible de réussir à s'écouter. 

La crise de la quarantaine, "une prise de conscience de sa propre condition de mortel"

La crise de la quarantaine ou la crise du milieu de vie est un mythe pour certains mais pour d'autres, c'est un cataclysme. Selon Emmanuel Bentata, psychologue et membre de la plateforme d'écoute Pros-consult, invité au micro d'Olivier Delacroix, elle concerne autant les hommes que les femmes. "Elle touche une majorité significative de personnes", assure-t-il. "Ce qui va varier, en revanche, c'est l'intensité et la durée".

Selon lui, cette crise est "une prise de conscience de sa propre condition de mortel". "Elle prend racine dans un phénomène de regard que va porter la personne sur sa propre vie. L'intensité et la durée de la crise naît de l'idéal qu'avait projeté la personne et ce à quoi elle est confrontée vraiment. Cela la renvoie à sa notion de valeur, de besoin, de sens", détaille-t-il. "Elle se demande si sa vie correspond vraiment à son besoin et à ses valeurs ou si elle est issue de facteurs normatifs, sociaux ou éducatifs."

Pour le psychologue, cette crise n'est pas forcément quelque chose de négatif. "Bien au contraire", estime-t-il. "Elle fait mal, elle est douloureuse, elle questionne, elle interpelle aussi l'entourage, mais elle n'est pas négative", assure-t-il. "Elle est constructive. Elle va permettre de redéfinir le socle, les fondements sur lesquels vont se construire une autre partie de vie avec ce que la personne est elle même réellement."