"D'après mon expérience, une plainte est prise environ une fois sur deux", affirme Emmanuelle Rivier (photo d'illustration).
  • Copié
Laetitia Drevet
Dans 41% des 88 homicides conjugaux et tentatives étudiés par les auteurs d'un rapport de l'Inspection générale de la justice, la victime s'était déjà signalée à la police. Emmanuelle Rivier, avocate au barreau de Paris, commente ces chiffres sur Europe 1. 
INTERVIEW

L'Inspection générale de la justice planchait dessus depuis juin. Un rapport très attendu sur les homicides conjugaux vient d'être remis à ministre de la Justice, Nicolas Belloubet. Avocate au barreau de Paris spécialiste des violences conjugales, Emmanuelle Rivier réagit au micro d'Europe 1. 

Dans 41% des 88 cas étudiés par les auteurs du rapport, la victime s'était déjà signalée à la police. "D'après mon expérience, une plainte est prise environ une fois sur deux", affirme l'avocate. Emmanuelle Rivier ne remet pas en cause les compétences des forces de police, mais pointe un manque d'effectif et de formation à ce sujet. "Quand la plainte est prise, l'enquête n'est pas bien menée. Dans la plupart des cas, les plaintes sont classées sans suite ou sous qualifiées." Même schéma du côté de la justice. "Il y a un problème d'écoute, de formation des magistrats et de sous effectif", observe-t-elle. D'après Emmanuelle Rivier, 80% des plaintes pour violences conjugales transmises au parquet sont classées sans suite. 

85% des auteurs d’homicides conjugaux sont des hommes

Problème judiciaire mais aussi politique, explique l'avocate. D'après le rapport, 85% des auteurs d’homicides conjugaux sont des hommes et 83% des victimes sont des femmes. "Pourtant, à aucun moment dans son interview au JDD, Nicole Belloubet ne parle de féminicide. En politique, il faut appeler un chat un chat", regrette-elle. La garde des Sceaux a livré dimanche un long entretien au JDD, en réaction à la publication du rapport. 

Pour y répondre, la ministre estime notamment que la police pourrait "s'inspirer de ce qui est fait à l'hôpital de Dax". Elle précise : "Les médecins amènent les victimes à verbaliser. Et ils ne les laissent pas repartir sans avoir contacté une association qui les accompagne immédiatement." Une idée qu'approuve Emmanuelle Rivet : "C'est très bien ce qui est fait à Dax, il faut le généraliser, et pas qu'aux hôpitaux. Quand une victime est prête à briser le silence, il faut quelqu’un pour l'écouter."