L'ancien capitaine du XV de France Abdelatif Benazzi a échoué à deux voix près à prendre la présidence de la fédération internationale World Rugby jeudi, étant devancé par l'Australien Brett Robinson qui a fait campagne sur l'accélération du jeu et la hausse des recettes commerciales.
Un duel serré pour la présidence de World Rugby
Le pari d'Abdelatif Benazzi, qui s'était lancé dans la campagne seulement en septembre, n'a pas réussi de peu. Il a obtenu 25 voix lors du second tour du scrutin, contre 27 pour Brett Robinson. L'Australien était le favori du scrutin depuis le retrait de l'Écossais John Jeffrey, qui était vu comme le dauphin de l'ancien président Bill Beaumont mais qui n'avait pas obtenu le soutien nécessaire de sa fédération. Lors du premier tour, Brett Robinson avait recueilli 22 voix, contre 21 pour Abdelatif Benazzi et 9 pour l'Italien Andrea Rinaldo.
Des visions divergentes pour l’avenir du rugby mondial
Abdelatif Benazzi et Brett Robinson s'accordaient pour dresser un portrait inquiétant de la santé du rugby, qui peine à devenir réellement un sport mondial et dont les fondations dans les pays historiques sont fragiles. Plusieurs fédérations souffrent de déficits importants et certains clubs phares en Australie ou en Angleterre ont fait faillite depuis le Covid-19.
Mais les deux hommes, qui tous les deux ont évolué en troisième ligne et se sont déjà affrontés sur le terrain, proposaient des mesures différentes pour y répondre.
Brett Robinson, 54 ans, avait axé sa campagne sur comment rendre le jeu plus spectaculaire et rapide, notamment pour les diffuseurs. Il a aussi assuré dans le communiqué de World Rugby qu'il voulait impulser "une culture adéquate pour atteindre des objectifs commerciaux".
L'Australien est un fervent soutien de plusieurs réformes expérimentées actuellement, comme la réduction du temps pour tirer les transformations ou pour préparer les mêlées et les touches. Il défend aussi le carton rouge de 20 minutes, qui permet à une équipe dont un joueur est expulsé de le remplacer après ce délai pour ne plus être en infériorité numérique. Le vote sur l'expérimentation au niveau mondial de cette mesure a été repoussé dans l'attente d'un "retour plus approfondi" sur les conséquences de son adoption, a décidé le Conseil de World Rugby jeudi. La France s'était positionnée en première ligne de l'opposition à ce changement, au nom de la sécurité des joueurs.
Abdelatif Benazzi, un des vice-présidents de la Fédération française du rugby chargé de l'international, avait promis d'œuvrer pour ouvrir le rugby à d'autres pays, au-delà des nations historiques encore hégémoniques sur le terrain mais aussi dans les instances. "Pour séduire des investisseurs, il faut démontrer de la clarté dans la gouvernance, une transparence et surtout une ouverture vers le monde investir dans les régions ou quelques pays quitte à en recevoir les dividendes dans quelques années", avait-il développé dans un entretien à l'AFP, ciblant notamment l'Afrique.
La France peine à renforcer son influence dans les instances internationales
Côté français, Florian Grill échoue de peu à réaliser le "Grand Chelem" politique qu'il ambitionnait : large vainqueur en octobre de l'élection à la Fédération française de rugby, il était ensuite parvenu à remporter la majorité des ligues régionales, lui donnant une grande marge de manœuvre au niveau national.
Il avait aussi ciblé l'élection de World Rugby pour redonner plus de poids à la France dans les instances. Elle en a perdu beaucoup depuis le départ de Bernard Lapasset, président de World Rugby entre 2008 et 2016. À l'élection continentale de Rugby Europe plus tôt en novembre, le Français Christian Dullin avait aussi été battu par le Néerlandais Jahnein Peterse, soutenu par les nations britanniques.