Quelles odeurs sentaient nos ancêtres ? Un groupe d'une quarantaine d'historiens, d'experts en intelligence artificielle, de chimistes et de parfumeurs a annoncé mardi qu'il allait recréer pour des expositions les odeurs qu'on trouvait en Europe du XVIe au XXe siècle, et créer en parallèle une encyclopédie des odeurs. C'est le début de trois ans de travail pour ressusciter les odeurs du passé et raconter l'Histoire du point de vue olfactif.
40 chercheurs et une intelligence artificielle
Le champ de bataille de Waterloo sentait-il autre chose que la poudre et canons ? C'est ce que va tenter de déterminer l'un des chercheurs qui travaille sur le projet Odeuropa. La méthode choisie va analyser 200.000 images et des milliers de textes historiques qui décrivent des odeurs à différentes époques. Une intelligence artificielle sera également chargée de trouver les références aux odeurs dans les textes.
L'air de Paris au 16e et 17e siècle avait par exemple probablement une touche de romarin, car cette plante était pour les habitants de l'époque un remède contre la peste et a donc été très utilisée. À l'inverse, les chercheurs feront sans doute ressortir la puanteur des villes européennes de la Révolution industrielle.
Faire découvrir les odeurs du passé au public
Une fois ces senteurs identifiées, le travail des experts commencera, explique Raphaël Troncy, enseignant-chercheur à l'école d'ingénieur Eurecom entre Nice et Cannes, et membre de ce projet. "On va travailler avec des chimistes et des entreprises qui créent des odeurs voire avec des parfumeurs à partir de recettes de cuisine, de descriptions chimiques de ces odeurs. On va en resynthétiser un certain nombre pour les recréer", explique-t-il.
Le projet Odeuropa, dont le coût s'élève à 2,8 millions d'euros financés par l'Union européenne, permettra ainsi d'interroger le statut des odeurs : "Est-ce que les odeurs doivent être considérées comme appartenant à notre patrimoine culturel ?", interroge le professeur William Tullett, historien à l'université Anglia Ruskin.. "Et si oui, est ce que nous devons les préserver pour le futur ?". Les échantillons d'odeurs recréées voyageront à partir de l'année prochaine dans différents musées européens ou sur des sites historiques pour des reconstitutions, plongeant les visiteurs olfactivement dans le passé.