L’INFO. Dennis McGuire, 53 ans, a été exécuté dans l’Ohio, le 16 janvier dernier. Pendant un quart d’heure, cet Américain, condamné à mort pour le viol et le meurtre d’une femme enceinte en 1989, a donné tous les signes d’une agonie atroce, suffoquant, éternuant et émettant des râles profonds. Quelques jours auparavant, dans l’Oklahoma, Michael Lee Wilson, un autre condamné à mort, s’était mis à hurler pendant son exécution : "je sens tout mon corps brûler". Le point commun entre ces deux hommes ? Ils ont reçu par injection un cocktail létal de produits inédits et controversés, tout simplement parce qu'il y a pénurie de l’une des substances utilisées habituellement. De quoi pousser les Américains à s’interroger sur leurs méthodes d’exécution et à envisager un retour à des pratiques encore plus brutales.
Un manque de sodium thiopental. Dans les 32 États américains autorisant la peine de mort, les condamnés sont la plupart du temps exécutés par l’injection d’un mélange de trois médicaments : un barbiturique ou un anesthésiant (en général du thiopental sodique), un agent paralysant (du pancuronium) et un produit causant l’arrêt du cœur (du chlorure de potassium), liste Time. Mais les autorités locales ont de plus en plus de mal à se procurer ces produits. Depuis 2011, l’entreprise américaine qui les fournissait en thiopental sodique a mis fin à sa production. Les fabricants européens, eux, refusent d’approvisionner les États qui risqueraient d’utiliser ces produits pour exécuter leurs condamnés à mort.
Des mélanges contraires à la Constitution ? Résultat : les États qui arrivent à court de ces produits doivent trouver d’autres solutions. C’est ainsi que Michael Lee Wilson a de son côté reçu un mélange contenant du pentobarbital, dont l’utilisation est controversée car sa qualité laisse parfois à désirer et que Dennis McGuire a reçu une injection d’un cocktail encore jamais testé. Or, ces exécutions controversées pourraient ouvrir la voie à des poursuites judiciaires, car la Constitution américaine interdit les peines "cruelles et inhabituelles".
Le retour du peloton d’exécution. Pour éviter de telles poursuites, qui risqueraient de remettre en cause la peine de mort dans leurs États, des législateurs proposent donc de renouer avec des méthodes abandonnées il y a plus d’une génération. Certains États proposent déjà aux condamnés à mort de choisir leur mode d’exécution, comme la Virginie, où la chaise électrique est présentée comme une alternative à l’injection létale. Dans le Missouri, les recours s’accumulent en raison de la provenance controversée des produits anesthésiants, fournis par un préparateur en pharmacie non homologué. Pour couper court à la polémique, le ministre de la Justice local envisage un retour à… la chambre à gaz, toujours légale dans son État. Quant à Rick Brattin, élu républicain du même État, il propose carrément de revenir au peloton d’exécution, utilisé pour la dernière fois dans l’Utah en 2010. La même proposition a été faite dans le Wyoming par un autre élu républicain, Bruce Burns. Son argument ? "En comparaison avec les autres méthodes d’exécution, c’est franchement la moins chère pour l’État".
De quoi remettre en question la peine de mort ? Du côté des abolitionnistes, on table sur le fait qu’un retour à des méthodes aussi brutales pourrait choquer les Américains. "Ces idées pourraient remettre en question la peine de mort, car je pense que la réaction du public sera la révulsion", explique ainsi au Guardian Richard Dieter, directeur du Centre d’information sur la peine de mort. Reste qu’aux États-Unis, si l’opposition à la peine de mort gagne peu à peu du terrain, une large majorité de la population y demeure favorable.
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