"On ne peut pas rester là sans rien faire, alors on essaie de participer à notre échelle et avec nos moyens", résume Claire Léger, la régisseuse des collections du musée départemental de la Résistance à Toulouse. Depuis deux semaines, c'est dans les réserves que s'empilent les dons collectés auprès des établissements culturels, des musées, et des archives de la région. Du matériel pour protéger le patrimoine culturel, menacé par la guerre en Ukraine.
"La demande de nos homologues ukrainiens qui nous ont envoyé la liste du matériel dont ils avaient besoin, c'est d'avoir tout type d'emballage et de conditionnements", précise-t-elle au micro d'Europe 1. Ils ont réuni dix tonnes de matériels. Des rouleaux de papiers bulle vont servir à emballer les objets en volume ou les statues monumentales qui ne peuvent pas être déplacées. Les plaques de bois médium serviront pour renforcer et couvrir les vitres ou les vitraux des églises.
Une quinzaine de musées mobilisés
Ils ont également recueilli des centaines de boîtes à archives. "Elles sont en PH neutre," précise Claire Léger. "Elles ne sont pas acides pour permettre de conserver dans de bonnes conditions et sur du long terme du matériau tels que les arts graphiques, les photographies ou les archives papiers. C'est pour la conservation de tout ce qui fait le patrimoine ukrainien de l'État-civil aux archives municipales ou politiques".
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En tout, une quinzaine de musées issus de six départements de la région Occitanie ont participé à cette opération organisée par l'Icom, le Conseil international des musées. Certaines boîtes affichent d'ailleurs encore des étiquettes des archives du département du Tarn ou du Lot. "Il a fallu mobiliser les collègues dans des délais très restreints", explique-t-elle. "Le but n'est pas de leur offrir du matériel neuf mais qu'il puissent utiliser pour gérer l'urgence et la crise".
Protéger l'histoire et la culture des populations
C'est l'association le Bouclier bleu, spécialisée dans la protection du patrimoine culturel partout dans le monde, qui s'occupe de la logistique de cette opération. Dès ce vendredi, le camion affrété gratuitement par le transporteur Chenue va prendre la direction de Paris puis de la Pologne et enfin de l'Ukraine en fin de semaine prochaine.
L'idée n'est pas de rapatrier les œuvres mais bien d'aider la population ukrainienne à protéger son patrimoine. "En aucun cas, les œuvres ne sortiront du territoire. Ça pourrait être considéré comme une spoliation ou du vol si jamais le conflit dégénérait", explique Hélène Gay des Archives départementales de la Haute-Garonne et membre du Bouclier bleu. "Pour l'instant c'est vraiment pour sécuriser les œuvres sur le territoire ukrainien. C'est ce qui a été fait en France pendant la Seconde Guerre mondiale. Ils vont les cacher et quelque part moins on en parlera, moins on citera les œuvres et les personnes qui vont s'en occuper plus on va les protéger".
L'idée est aussi de permettre au peuple ukrainien de conserver son histoire et sa culture. "On s'est aperçu après la Seconde Guerre mondiale que le fait de détruire le patrimoine complique la résilience d'une population", précise Hélène Gay. "Cibler la destruction de patrimoine culturel, c'est vraiment cibler la destruction d'une population avec toute son histoire locale. En protégeant le patrimoine, on protège aussi l'histoire des populations".