C'était la première fois que la droite se livrait à l'exercice d'un débat pour une primaire, jeudi soir. De débat, il n'a finalement été que rarement question. Contraints par le temps, les sept candidats sur le plateau de TF1 se sont plus volontiers livrés à de courts monologues, les échanges restant l'exception. La première partie de la soirée, consacrée à l'économie, a rapidement tourné à un empilage de chiffres. Une discussion très technocratique qui aura laissé plus d'un spectateur sur sa faim.
La seconde partie, plutôt centrée sur les questions d'identité, l'immigration ou encore la transparence de la vie politique, a été plus riche en interpellations. Certaines inimitiés connues, notamment entre Nicolas Sarkozy et Jean-François Copé, sont devenues palpables derrière des propos globalement très policés. Et de réelles divergences de points de vue entre les candidats ont été mises en lumière, tant sur les institutions –l'usage du référendum- que sur le terrorisme –l'internement préventif des fichés S les plus dangereux.
- Comment s'en sont sortis les favoris ?
Tous les sondages les donnent qualifiés au second tour du scrutin. Mais comment s'en sont sortis Nicolas Sarkozy et Alain Juppé ? S'il a voulu apparaître énergique, Nicolas Sarkozy a en réalité souvent semblé tendu, mal à l'aise à l'idée de partager le plateau avec six autres concurrents et de se soumettre à un temps de parole (très) limité. C'est devenu particulièrement perceptible à la fin du débat, lorsque l'ancien président n'a pu se retenir d'interrompre Jean-François Copé. L'ex-chef de l'État a pourtant vu la plupart de ses idées occuper le devant de la scène, commentées par ses adversaires. Mais il a aussi été le plus attaqué de tous, ses positions sur l'islam, la détention préventive des fichés S ou encore ses ennuis avec la justice étant régulièrement critiqués.
Alain Juppé, quant à lui, a joué la carte de la prudence, se gardant de toute attaque, répondant posément à celles (assez rares) qui lui ont été adressées. Avec le risque de paraître trop en retrait, voire quasiment transparent ou un peu trop sûr de l'issue du scrutin. Si ce n'est lorsque sa condamnation par la justice en 2004 a été abordée, l'ancien Premier ministre n'a pas eu trop de fil à retordre avec les sujets abordés. Son "identité heureuse", par exemple, n'a été que peu raillée par ses adversaires.
- Qu'ont fait les candidats à la troisième place ?
Bruno Le Maire et Nathalie Kosciusko-Morizet étaient très attendus sur le créneau de la modernité et du renouveau. Force est de constater que la seconde a mieux réussi à se positionner que le premier. Seule candidate à creuser le sujet de la fin du salariat, Nathalie Kosciusko-Morizet s'est aussi démarquée, sur le fond, en s'opposant à la suppression de l'ISF. Et a conclu sur une pique à ses adversaires : "le recyclage, ça marche pour les déchets, pas pour les idées."
À l'inverse, Bruno Le Maire s'est montré souvent très scolaire en dépit d'une attaque en règle dès sa première minute d'intervention ("Si vous voulez que tout continue comme avant, vous avez tout ce qu'il faut sur ce plateau"). Sa présentation aux allures de clip de campagne manquait de naturel et, à l'exception d'une passe d'armes avec Alain Juppé sur l'identité et la culture, l'ancien ministre de l'Agriculture n'a pas réussi à se faire remarquer.
François Fillon, quant à lui, est resté sur son créneau sérieux, allant jusqu'à recadrer le débat en matière de dette après une digression de Jean-Frédéric Poisson. Offensif, notamment lorsqu'il lui a fallu répondre sur les accusations de François Hollande rapportées dans le livre de Gérard Davet et Fabrice Lhomme, sans être agressif, l'ancien Premier ministre s'en est plutôt bien sorti.
- Au final, qui est sorti du lot ?
Jean-François Copé et Jean-Frédéric Poisson sont les deux candidats qui se sont le plus fait remarquer lors du débat, pour des raisons très différentes. Le premier a été, de loin, le plus mordant de tous, auteur des attaques les plus virulentes à l'égard de Nicolas Sarkozy. L'ancien président de l'UMP a notamment pointé sa déception du quinquennat, parlant au passé de sa collaboration avec l'ancien président. "En 2007, comme des millions de Français, j'avais espéré la rupture. Malheureusement, on ne l'a pas faite", a-t-il souligné. Il s'est vu vertement rappeler à l'ordre par Nicolas Sarkozy lorsqu'il a tenté de se positionner comme l'initiateur du projet de loi sur la burqa.
Quasiment inconnu avant le débat, Jean-Frédéric Poisson a, lui, capitalisé sur cette position pour se révéler. Le président du Parti chrétien-démocrate, qui n'était pas interrogé sur ses sujets de prédilection tels que la famille, est apparu très pondéré. S'il a parfois répondu à côté des questions –ce que les journalistes ne se sont pas privés de souligner-, Jean-Frédéric Poisson a aussi su recadrer posément le débat sur les thèmes de la laïcité ou des syndicats. Le tout en restant souvent plus naturel que ses concurrents.
√ Les candidats sont notés comme les footballeurs au lendemain d'un match de foot, s'amuse Natacha Polony [REVUE DE PRESSE] :
√ Et qu'en ont pensé les militants, eux ? La réponse ici [REPORTAGE] :