Un nouveau texte d'abrogation de la retraite à 64 ans, que les députés Insoumis prévoyaient d'inscrire dans leur "niche parlementaire" fin novembre, a été jugé irrecevable mercredi par la plus haute instance de l'Assemblée nationale, une "honte démocratique" selon LFI. La décision a été entérinée par un vote du bureau de l'Assemblée. Elle a notamment été justifiée par l'interdiction constitutionnelle pour les parlementaires de créer des charges pour les finances publiques, et par la nécessité de protéger l'institution de décisions "contradictoires", ont indiqué des sources parlementaires à l'AFP.
"C'est une honte démocratique"
"C'est juste la négation du Parlement, c'est-à-dire que le Parlement ne pourrait pas changer une loi dont je rappelle qu'elle n'a jamais été votée par l'Assemblée nationale" car "passée par force, par 49.3", a réagi Mathilde Panot, la cheffe de file des députés LFI, devant des journalistes. "Le plus grave, c'est que Yaël Braun-Pivet (la présidente de l'Assemblée, ndlr) a expliqué que cette décision s'appliquerait à l'ensemble des textes qui voudraient abroger la retraite à 64 ans, c'est une honte démocratique, un scandale", a jugé Mathilde Panot.
Le bureau de l'Assemblée - qui comprend notamment les vice-présidents, questeurs et secrétaires de l'institution - avait déjà retoqué mi-octobre deux textes de LFI visant à abroger la réforme. Mais les Insoumis pensaient avoir trouvé la parade en proposant cette fois l'examen de l'un des deux textes d'abrogation déposés plus tôt dans l'année par le groupe indépendant Liot, qui avait passé un premier filtre de recevabilité sans être examiné ensuite.
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"C'est grave en termes de jurisprudence"
Les deux députés chargés au nom du bureau de passer les propositions de loi au filtre de l'article 40 de la Constitution, sur la recevabilité financière, avaient en effet donné leur feu vert. Mais l'un d'eux, membre du camp présidentiel, "est revenu sur sa décision, ce qui a donné au bureau la possibilité d'un réexamen", a indiqué un de ses membres à l'AFP. "Le règlement n'autorise pas cela", a estimé mardi le président LFI de la commission des Finances, Éric Coquerel. "C'est extrêmement grave en termes de jurisprudence", a-t-il ajouté, disant étudier la possibilité de recours.
LFI avait prévu d'inscrire ce texte d'abrogation en première place à l'ordre du jour de sa journée réservée à l'Assemblée, le 30 novembre. Le groupe Liot avait pris la même initiative lors de sa "niche parlementaire" en juin. Mais le texte d'abrogation qu'ils avaient mis en avant avait été vidé de sa substance en commission, avant que Yaël Braun-Pivet ne fasse barrage, au nom de l'article 40 de la Constitution, à des amendements rétablissant sa mesure-phare avant le débat dans l'hémicycle.