C'est le clap de fin pour les "Whirlpool Amiens". Depuis 5 heures ce jeudi matin, les machines de l'usine, qui était devenue un symbole de la campagne présidentielle, se sont arrêtées après de longs mois de lutte pour un plan social avantageux. Même si près de 180 salariés sur les quelques 285 du site commencent dès lundi leur formation pour leur nouvel emploi, l'ambiance est à la nostalgie chez les Whirlpool.
"On a fait des vidéos, des photos". "C'est difficile parce que c'est la fin", souffle Catherine, déléguée CGC, la Confédération générale des cadres. "Après au moins 30 ans dans la même entreprise, on ne s'en sort pas indemne, on est cassé mentalement", admet-elle. "Il va falloir se reconstruire, ça va être une période délicate, mais pour mes collègues qui ont déjà retrouvé du travail". "On a arrêté la ligne de production plusieurs fois cette nuit", confie Jordan désormais ex-Whirlpool. "On a tous signé le dernier sèche-linge et on a fait des vidéos, des photos. On l'a suivi jusqu'au bout, jusqu'à ce qu'il soit prêt à partir", explique-t-il. "Ma mère a bossé ici pendant 28 ans, mon père pendant une dizaine d'années, la fermeture ça m'a fait bizarre, j'avais les boules et j'ai retenu mes larmes".
"On a vécu dix fois plus de temps à l'usine que chez nous", ajoute Sébastien, 39 ans, entré chez Whirlpool à 18 ans. "J'ai fini ma dernière journée, je suis licencié, c'est compliqué". Mais pour les salariés embauchés par WN, le repreneur du site, la formation commence dès lundi. D'ici quelques semaines, les ex-Whirlpool vont fabriquer des casiers réfrigérés pour la distribution automatique de produits mais aussi, à terme, des petites voitures et des scooters électriques.
"D'ici dix ans, on va se retrouver dans la situation de la France"
L'usine d'Amiens fermée, les machines ont toutes pris la direction de Lodz, en plein cœur de la Pologne. "Pour nous c'est une bonne nouvelle", explique Tomac, ouvrier Whirlpool. "J'ai entendu que c'était un problème en France, mais ce n'est pas ma décision, c'est un choix d'économiste", souffle-t-il. "Le travail est moins cher ici, c'est sûr", explique une membre de l'Alliance Française, une association dont l'objectif est de faire rayonner la culture française à l'international. "Dans dix ans, ça va se délocaliser dans un pays encore moins cher et on va se retrouver dans la situation de la France, ce n'est pas magique non plus", s'inquiète-t-elle. "Le contexte est très bon, mais nous avons des difficultés à embaucher de bons ouvriers", détaille de son côté Dorota, chargé du recrutement. A Whirlpool Lodz, les ouvriers touchent en moyenne trois euros de l'heure.