Le 11 juillet dernier, le Comité international olympique (CIO) entérinait la double attribution des prochains Jeux d'été à Paris et Los Angeles pour 2024 ou 2028. Les maires des deux villes, Anne Hidalgo pour Paris et Eric Garcetti pour Los Angeles, montaient alors à la tribune pour encadrer le président du CIO, Thomas Bach, pour symboliser ce choix qualifié par les trois parties de "gagnant-gagnant-gagnant".
Mais de "gagnant-gagnant-gagnant", il s'agissait d'abord d'un choix "négociant-négociant-négociant", les deux villes et le CIO devant maintenant s'accorder sur qui organise quoi. "Ça discute vraiment", a souligné au micro d'Europe 1 la maire de Paris, Anne Hidalgo, dimanche, en marge du passage du Tour de France dans le Grand Palais. "J'ai la chance d'avoir une belle relation avec le maire de Los Angeles, Eric Garcetti. Nous nous sommes beaucoup parlé, encore la semaine dernière. Nous échangeons, nous avons vraiment envie que cette relation d'amitié entre nos deux villes aide nos deux candidatures. (….) Ça discute, ne soyez pas trop impatients."
Ça discute, oui, mais ça ne négocie pas forcément entre les deux villes. En réalité, et d'après les informations obtenues par Europe 1, Paris laisserait le CIO traiter directement avec Los Angeles. La position de la candidature parisienne est connue et elle est répétée depuis plusieurs mois : "Paris est candidat pour les JO de 2024 et non pour les JO de 2028." Los Angeles, elle, a ouvert la porte à une organisation des JO 2028, ce que n'a jamais fait Paris. Paris 2024 et Los Angeles 2028, voilà qui réjouirait les uns sans fâcher les autres.
Compensations financières. Mais alors, de quoi discute-t-on actuellement ? D'argent, évidemment. Même si elle a ouvert le porte à l'organisation des JO 2028, Los Angeles a préparé sa candidature pour 2024, ce qui veut dire qu'elle a débloqué des fonds, structuré des lieux et échafaudé des plans pour 2024. "Il s'agit maintenant de discuter notamment des compensations versées à la ville qui acceptera 2028, notamment pour geler des sites prévus à l'origine pour 2024", avait expliqué un membre du CIO au moment du vote sur la double attribution.
Alors que Rio 2014 avait bénéficié d'une aide officielle de 1,5 milliard de dollars (1,3 milliard d'euros), la ville qui héritera des JO 2024 devrait recevoir 1,7 milliard de dollars (1,5 milliard d'euros), selon des sources concordantes, une aide qui pourrait augmenter mécaniquement de 100 à 200 millions de dollars (85 à 170 millions d'euros) pour 2028. Los Angeles conditionnera-t-elle son retrait pour 2024 à un gonflement de l'enveloppe du CIO ? Peut-être. La Cité des Anges a tout à y gagner. Car, en allant au duel avec Paris pour l'attribution des Jeux 2024, elle ne serait pas favorite. La Ville lumière, qui a l'avantage d'avoir déclaré sa flamme aux Jeux avant Los Angeles, "remplaçante" au pied levé de Boston, a de solides arguments à faire valoir : des infrastructures déjà en place, un soutien politique sans faille, le 100ème anniversaire des Jeux de 1924…
La peur du vote. Mais un vote du CIO le 13 septembre prochain fait peur à Paris. Car un vote, avec ses intrigues de couloir et ses membres du CIO influençables, n'écarte pas totalement la possibilité de tout perdre. Paris 1992, Paris 2008, Paris 2012 : la capitale reste sur plusieurs échecs retentissants, dont le dernier en date, celui de 2012, alors qu'elle était favorite face à Londres, reste le plus inattendu. Voir à nouveau les Jeux se dérober serait vécu comme un traumatisme par les autorités sportives et politiques françaises. Par ailleurs, avec le discours tenu depuis des semaines et toutes les dispositions prises pour des JO en 2024, les organiser en 2028 semble hors de question.
Du côté du CIO, mécontenter Los Angeles, et par extension les États-Unis, n'est guère envisageable non plus, alors que les pays candidats à la grand-messe de l'olympisme sont de moins en moins nombreux. Pour ces Jeux de 2024, Boston, Hambourg, Rome et Budapest ont tour à tour jeté l'éponge. Les Jeux 2024 auront donc certainement lieu à Paris et ceux de 2028 à Los Angeles. Plus que quelques jours à attendre avant l'officialisation. Et sans doute quelques grasses promesses…