L'objectif européen d'interdire complètement la vente de voitures thermiques neuves à l'horizon 2035 sera "compliqué" à tenir, a estimé le patron de Renault Luca de Meo, dans une interview aux Échos à paraître lundi, réclamant de la "souplesse dans le calendrier". "Basculer en douze ans de 10% de parts de marché pour les VE (véhicules électriques, NDLR) à 100%, c'est vraiment très compliqué", a expliqué Luca de Meo aux Échos et à trois titres de la presse européenne.
"Nous avons besoin d'un peu plus de souplesse dans le calendrier", a-t-il ajouté, rappelant que lorsque la décision d'interdire la vente de moteurs thermiques d'ici à 2035 a été prise "la position de la France et celle de Renault Group ont été plutôt de dire que 2035, c'était trop tôt et qu'il fallait plutôt viser 2040". "Nous ne sommes pas encore sur la bonne trajectoire pour arriver à 100% de voitures 100% électriques en 2035. (...) Pour autant, il ne faut pas instrumentaliser le ralentissement actuel du marché pour abandonner purement et simplement l'objectif. Ce serait une grave erreur stratégique", a aussi souligné le patron de Renault.
"Il faut que l'écosystème avance ensemble, tous ensemble"
Luca de Meo rappelle que l'industrie automobile a "investi des dizaines de milliards d'euros dans la transition" vers l'électrique et qu'il ne faut pas "les jeter par les fenêtres". Par ailleurs, "nous ne devons pas refuser le progrès" et "l'électrification dans l'automobile fait partie du progrès", a-t-il martelé. "La question, c'est celle du rythme", explique Luca de Meo, mettant en avant que "la majorité des pays n'ont pour l'instant pas dépassé les 7% de part de marché dans l'électrique à ce jour". "Il faut que l'écosystème avance ensemble, tous ensemble. C'est de cela dont je parle quand je demande de la souplesse et de l'agilité", explique-t-il.
En février, Luca de Meo avait déjà jugé qu'un retour en arrière sur l'interdiction des voitures essence et diesel en 2035 serait bienvenu, mais compliqué. "J'espère que l'interdiction s'appliquera un peu plus tard, parce que je pense que nous ne serons pas capables de la faire sans endommager toute l'industrie et toute la chaîne de valeur de l'automobile européenne", avait-il déclaré au salon de l'automobile de Genève. Enfin pour le patron de Renault, "la voiture électrique n'est qu'une des solutions" pour décarboner le secteur automobile. Pour lui il serait "plus judicieux d'accélérer en même temps la rénovation du parc" et de "regarder ce que l'on peut faire du côté des types de carburants".
"Dans les dix prochaines années, il n'y a pas suffisamment de voitures électriques pour vraiment impacter la décarbonisation. (...) À la roulette, on ne peut pas miser tout sur une couleur", conclut-il.