Le parquet de Paris a requis vendredi un procès devant la cour criminelle départementale pour un policier suspecté d'avoir éborgné en janvier 2019 le "gilet jaune" Jérôme Rodrigues en lançant une grenade de désencerclement place de la Bastille, a appris l'AFP jeudi de sources proches du dossier.
Procès pour violences avec arme, par personne dépositaire de l'autorité publique
D'après ces sources confirmant Mediapart, le parquet de Paris a requis contre Brice C., qui a plaidé la légitime défense, un procès pour violences avec arme, par personne dépositaire de l'autorité publique, ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, soit un crime passible de 15 ans de prison.
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Dans ce dossier, Brice C. ainsi qu'un autre fonctionnaire de police, Baptiste R., avaient été mis en examen en janvier 2021 à Paris respectivement pour la mutilation de Jérôme Rodrigues et la blessure à la jambe par un tir de lanceur de balles de défense (LBD) d'un de ses amis, Michaël, place de la Bastille lors de l'acte 11 des "gilets jaunes", le 26 janvier 2019. Pour ce second policier, un procès est requis pour violences volontaires aggravées n'ayant pas entraîné une ITT supérieure à huit jours, un délit.
A l'époque des faits, la concomitance du tir de LBD et du lancer de grenade sur le groupe de Jérôme Rodrigues avait créé la confusion sur l'origine des blessures. D'autant que les autorités avaient un temps contesté l'usage du LBD à l'heure des faits. Mais le travail conjoint de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) et du magistrat instructeur pour éplucher les nombreuses vidéos amateurs et sécuritaires de la scène, ainsi qu'une remise en situation place de la Bastille, a permis de clarifier aux yeux de la justice les responsabilités.
Pour Jérôme Rodrigues, ce dossier est "terminé, c'est du passé"
Sollicité par l'AFP, Jérôme Rodrigues a répondu aller "mal" et que ce dossier était pour lui "terminé, c'est du passé". Son avocat, Me Arié Alimi, a indiqué que c'était désormais "l'heure des comptes. Et ils vont devoir être rendus par Laurent Nuñez (le préfet de police, NDLR), par les syndicats de police, par la place Beauvau et par Emmanuel Macron qui sont responsables des victimes du maintien de l'ordre".
"Le gardien de la paix soutient de manière constante depuis le début de cette procédure avoir agi en état de légitime défense" a regretté de son côté Me Sébastien Journé, qui défend Brice C. avec Me Gilles-William Goldnadel. Au moins vingt-trois éborgnés avaient été recensés par l'AFP lors du mouvement des "gilets jaunes" à l'hiver 2018-2019. Selon une enquête de l'AFP en novembre 2023, aucun n'a obtenu la condamnation de l'auteur de sa blessure.