Restés placides depuis le début de l'année et l'arrivée au pouvoir d'Alexis Tsipras, les négociateurs européens ont haussé le ton vendredi en assurant qu'ils n'excluaient plus le scenario d'une faillite de la Grèce. Une sortie remarquée qui n'a pas manqué de faire réagir Athènes, puisque le Premier ministre grec s'est dit vendredi soir prêt à "un accord viable, même si le compromis est difficile". Sauf que le dialogue fut visiblement compliqué : la délégation grecque a quitté Bruxelles dimanche en dénonçant des exigences "irrationnelles" de la part des créanciers.
Reste à savoir si cette preuve de bonne volonté suivie d'une nouvelle brouille ne sont que le dernier coup de bluff d'une longue partie de poker menteur ou le signe qu'un accord est proche. Seule certitude, le temps presse : Athènes doit rembourser d'ici la fin du mois plus de 1,5 milliard d'euros au FMI, sans que l'on sache s'il dispose de cet argent.
"Nous aurons un accord". Signe de la mobilisation côté grec, pas moins de trois membres du gouvernement a pris la parole depuis vendredi soir. "Si on arrive à un accord viable, même si le compromis est difficile, on va relever ce défi car notre seul critère est la sortie de la crise", a déclaré le Premier ministre grec, Alexis Tsipras, lors d'une réunion vendredi soir avec ses collaborateurs. Ces propos ont été cités samedi dans un communiqué du gouvernement, montrant que la Grèce est disposée à faire éventuellement de nouvelles concessions.
Le ministre grec des Finances, Yanis Varoufakis, a exhorté samedi sur la radio BBC 4 à travailler à une solution "mutuellement avantageuse" qui ne "joue pas sur le scénario d'une fragmentation" de la zone euro. "Je pense qu'aucun bureaucrate ou responsable politique européen ne s'engagera sur la voie" d'un défaut grec, a-t-il dit. "Nous aurons un accord", a assuré samedi matin à la télévision Skaï le ministre adjoint des Finances grec, Dimitris Mardas, soulignant que "le fait que la délégation grecque va à Bruxelles est un signe de bon augure".
La Grèce revient à la table des négociations. Suite aux déclarations européennes de vendredi sur un possible défaut de paiement grec, Athènes a en effet décidé de renouer le dialogue qu'il avait interrompu en quittant la table des négociations. Une délégation de haut niveau du gouvernement grec est donc arrivée samedi à Bruxelles pour présenter aux institutions créancières du pays, UE et FMI, de nouvelles propositions pour tenter de surmonter les désaccords et éviter un défaut de paiement. Or le versement de cette aide dépend de la mise en place de réformes sur lesquelles Athènes et ses créanciers s'écharpent depuis près de quatre mois.
Si la Grèce venait à accepter la feuille de route proposée par ses créanciers, elle souhaite obtenir en échange un allègement de sa dette, une hypothèse que refusent les pays du nord de l'Europe. Le ministre grec des Finances grec a quand même proposé samedi que le Mécanisme européen de stabilité (MES), le fonds d'urgence de la zone euro, accorde un nouveau prêt sur trente ans à la Grèce, à un taux d'intérêt de 1,5%, et que le MES rachète pour 27 milliards d'euros d'obligations souveraines grecques détenues par la Banque centrale européenne (BCE).
Puis la quitte une nouvelle fois. La feuille de route proposée par la Grèce et celle de ses créanciers sont encore bien éloignées et les discussions de ce week-end n'ont pas permis de rapprocher les points de vue : aucun accord n'a été possible et les déclarations accusatrices ont fait leur retour. "Les réclamations des créanciers sont irrationnelles, les discussions ont duré 45 minutes", a souligné une source gouvernementale grecque dimanche soir. Cette dernière a imputé la responsabilité de l'échec d'un accord surtout au FMI, dont "la position était intransigeante et dure" car il insistait sur de nouvelles coupes des retraites et sur l'augmentation de la TVA.
Le bras de fer continue donc mais le temps presse. L'idéal serait de trouver un accord d'ici à jeudi, date de la prochaine réunion des ministres des Finances de la zone euro, qui devront l'entériner à l'unanimité. Certains parlements nationaux devront ensuite donner leur feu vert au déboursement de l'aide. Mais il faudra au préalable que la Grèce et ses créanciers retrouvent le chemin d'un dialogue apaisé.