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Chaque jour, Bruno Donnet regarde la télévision, écoute la radio et scrute les journaux ainsi que les réseaux sociaux pour livrer ses téléscopages. Ce mercredi, il s'intéresse à l'enquête de Mediapart sur les accusations de violences sexuelles à l'encontre de Gérard Depardieu.

Tous les jours, Bruno Donnet observe les productions médiatiques. Ce matin, il a lu pour nous la très longue enquête de Médiapart qui accuse Gérard Depardieu de « violences sexuelles ».

C’est une somme qu’il faut plusieurs heures pour bien lire, signée de la journaliste Marine Turchi qui a paru, hier soir, sur le site de Médiapart.

Une très longue enquête, qui lui a pris des mois et qui révèle des témoignages. De très nombreux témoignages, 13 femmes qui toutes accusent Gérard Depardieu de s’être rendu coupable de viols et de violences sexuelles.

Il faut préciser que Marine Turchi a bien évidement sollicité Gérard Depardieu, elle lui a envoyé une liste de questions écrites mais que le comédien n’a pas souhaité lui répondre. Seuls ses avocats ont échangé avec Médiapart pour démentir, formellement « l’ensemble des accusations susceptibles de relever de la procédure pénale. »

Néanmoins, c’est bien une enquête glaçante que Bruno Donnet a lu ce matin.

Un récit qui fait froid dans le dos et qui s’ouvre par le post que la réalisatrice Andréa Bescond a publié sur son compte Instagram :« Tu t’appelles Gérard Depardieu, écrit-elle, tu es mis en examen pour viols et agressions sexuelles. Tu dégoûtes mais le pire, c’est que les français sont encore de ton côté. »

Car à en croire le journal, les faits reprochés au comédien ne sont pas neufs. Gérard Depardieu est en effet mis en examen depuis décembre 2020.

Depuis que Charlotte Arnaud, une jeune comédienne qui avait 22 ans au moment des faits présumés, est allée porter plainte pour « viols », avec un « S », contre le monument du cinéma français.

Mais au-delà de cette plainte, ce sont bien les témoignages qu’a recueilli Marine Turchi qui glacent le sang. Les femmes qui se sont livrées à elle sont comédiennes, maquilleuses, techniciennes ou figurantes, et elles racontent toutes les coulisses de tournages de films, 11 films précisément, qui sont sortis entre 2004 et 2022.

Ces témoignages décrivent tous les mêmes procédés.

Ce qui frappe et ce qui fait la force de cette enquête. C’est, une fois encore, l’accumulation des témoignages. « Une fois encore » car c’est la même méthode qui avait été employée pour les révélations au sujet de Patrick Poivre D’Arvor ou de Nicolas Hulot. Une longue litanie qui met profondément mal à l’aise mais qui est pourtant, totalement inévitable.

Médiapart a recueilli, entre autres, les confidences de Sarah Brooks, actrice, qui avait 20 ans lorsqu’elle a croisée Depardieu sur le tournage de la série « Marseille ».

Elle raconte : « Je lui ai enlevé une deuxième fois la main de mon entrejambe et j’ai crié sur le plateau : Hey, y’a Gégé qui met sa main dans mon short ! Il m’a alors répondu : Bah, je croyais que tu voulais réussir dans le cinéma ! Tout le monde a ri et du coup, Gérard a continué. »

On croise aussi dans cet article. Alysse Hallali, elle avait 17 ans lorsqu’elle a tourné « L’autre Duras » avec Depardieu. Elle reproche à l’acteur une série d’attouchements et elle dit : « Des adultes ont laissé un acteur me tripoter les seins devant tout le monde ! »

Mais il y aussi le réalisateur Fabien Onteniente qui explique qu’il a été contraint de recadrer « très fermement » Gérard Depardieu sur le tournage du film « Disco », Hélène Darras, une figurante qui avait 26 ans lorsque la star du cinéma lui a collé la main aux fesses en lui proposant « d’aller faire un tour dans sa loge », ou encore Jeanne, une comédienne de 39 ans, qui confie que sur le tournage du film « La Môme », en 2007, Depardieu lui a dit, devant toute l’équipe : « Tu mouilles ? Je vais te lécher la chatte. Enlève ton Tampax. » Suscitant, là encore, l’hilarité générale.

Car au-delà des violences sexuelles et sexistes qu’ils dénoncent, les récits que publie Médiapart interrogent aussi sur la complaisance, la complaisance dont aurait bénéficié durant toutes ces années, l’acteur de 74 ans.

« Oh, ça va, c’est Gérard ! » voilà la phrase qu’a attendu cette autre jeune femme, à qui Depardieu a mis la main dans la culotte.

« ça va, c’est Gérard », probablement la phrase la plus symptomatique que vous lirez dans Médiapart, tant elle témoigne de l’impunité, d’une impunité totale, érigée comme système.

Enfin et comme à chaque fois dans ce genre d’affaire, on est frappé par l’accumulation des témoignages, néanmoins on ne peut s’empêcher de se poser une question : qui se serait produit si Médiapart n’en avait recueilli qu’un… ?

Aurait-il, pour autant, été moins important ? Moins crédible ? Et l’enquête moins sérieuse ?

C’est ici une immense question qui se pose à la presse.

En attendant qu’elle y réponde, on se doit de préciser que Gérard Depardieu est, bien sûr, présumé innocent.