Il aura fallu plus de quinze heures de bataille diplomatique toute la nuit à Minsk, en Biélorussie, pour trouver un accord sur le conflit ukrainien. Depuis mercredi après-midi, François Hollande, Angela Merkel, Vladimir Poutine, Petro Porochenko et les représentants des républiques séparatistes ukrainiennes étaient réunis sous les ors du palais de l'Indépendance de Minsk. Ils y ont mené une bataille faite de discussions de couloirs, de notes diplomatiques, d'intimidations et de compromis qui s'est achevée jeudi matin. Jusqu'à réussir à trouver un accord commun.
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• Ce qui a été décidé
Le cessez-le-feu décrété à partir du 15 février. C'était le principal objectif de la diplomatie européenne. Un cessez-le-feu a donc été décrété dans l'est de l'Ukraine. Il prendra effet le 15 février, tandis que les combats se poursuivaient encore ce jeudi autour de Donetsk, où six civils sont morts dans les bombardements. Ce n'est pas la première fois que l'arrêt des combats est diplomatiquement accepté par les combattants. En septembre dernier déjà, après une réunion à Minsk, un cessez-le-feu avait été décidé. Il n'avait pas été appliqué dans les faits. "L'accord ne garantit pas qu'il y aura dans les jours prochains un succès durable, cela suppose que nous continuions à être vigilants", a prévenu François Hollande, jeudi, à son arrivée au Conseil européen de Bruxelles.
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Le retrait des armes lourdes. Comme en septembre dernier, ce nouvel accord prévoit le retrait des armes lourdes de la ligne de front afin de limiter l'intensité des combats en cas de reprises des affrontements. Le premier programme de désarmement de septembre n'avait pas été efficace, puisque les séparatistes avaient lancé une nouvelle offensive vers l'ouest au mois de janvier, qui avait attisé les tensions.
La création d'une zone-tampon. Deuxième volet militaire de l'accord, la création d'une "zone-tampon élargie". Le texte prévoit le retrait des combattants sur une zone de 50 à 70 kilomètres de large afin d'éviter toute reprise des violences. C'est une progression par rapport aux accords précédents qui définissaient une zone-tampon plus réduite, de seulement 30 kilomètres. Les belligérants devront quitter cette zone avant le 26 février.
Le respect de l'intégrité territoriale de l'Ukraine. Plus politique, l'accord contient, comme l'a rappelé François Hollande au sortir des négociations, l'affirmation du "respect de l'intégrité territoriale de l'Ukraine". Mais des paroles aux actes, il y a encore un long chemin à parcourir. En effet, une cinquantaine de chars et autres équipements lourds ont pénétré sur le territoire ukrainien depuis la Russie dans la nuit de mercredi à jeudi, selon l'armée ukrainienne. Une incursion qui est intervenue en pleine négociations de paix.
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• Ce qui a été éludé
Le statut des républiques séparatistes. Directement lié au point précédent, le statut des républiques séparatistes ne figure pas dans le texte de l'accord. Si la préservation de l'intégrité territoriale de l'Ukraine signifie bien que Donetsk et Lougansk ne seront pas indépendantes, rien n'est encore fixé sur leurs relations politiques et administratives futures avec Kiev. L'Ukraine prendra-t-elle la voie de la "décentralisation" défendue dans les accords de septembre ou celle de la "fédéralisation" défendue par les séparatistes ? Dans le premier cas, elles ne disposeraient que d'une certaine autonomie. Dans l'autre, elles pourraient influer sur les décisions de politique nationale ukrainienne.
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La question du contrôle de la frontière russo-ukrainienne. C'est une des clés du conflit. Quand, en septembre dernier, l'OSCE avait affirmé qu'elle veillerait au contrôle de la frontière entre Russie et Ukraine, tenue en partie par les séparatistes ukrainiens, c'était justement pour empêcher la Russie de soutenir militairement et matériellement une possible offensive séparatiste vers l'ouest. C'est pourtant ce qui s'est passé. Comment empêcher la Russie de passer la frontière ? C'est une des questions auxquelles il faudra répondre pour s'assurer de la bonne résolution du conflit. Pour l'instant, l'accord signé à Minsk ne donne aucune réponse à ce sujet. C'est peut-être la raison pour laquelle Angela Merkel, au sortir de la salle de négociations, a déclaré qu'elle ne se faisait "aucune illusion" face aux "gros obstacles" qui restait à surmonter.