A l'université de l'Ivy League Amherst College aux Etats-Unis, il partageait sa chambre avec l'ex-Premier ministre, George Papandréou, son futur rival en politique trente ans plus tard. Et pourtant, Antonis Samaras, 61 ans, le nouvel homme fort de l'exécutif grec, n'a pas toujours été l'homme de la cohabitation tranquille.
Le leader conservateur de Nouvelle Démocratie (ND) devra passer outre sa fameuse "intransigeance" politique pour incarner le rassemblement avec les socialistes du Pasok et le petit parti de la gauche modérée, Dimar.
Des tergiversations en série
Antonis Samaras n'a effectivement pas toujours été le rassembleur attendu. Depuis le début de la crise grecque, il a même jeté plus d'une fois de l'huile sur le feu, comme le raconte La Croix. En juin 2011, malgré les pressions des bailleurs de fonds, ce fils de cardiologue renommé et détenteur d'un MBA en économie à Harvard avait pourtant refusé une première main tendue par l'ex-Premier ministre, Georges Papandréou.
Antonis Samaras a d'abord bataillé ferme contre la cure d'austérité administrée aux Grecs sous la dictée de l'Union européenne et du FMI, en échange de la première perfusion financière ayant évité la banqueroute au pays en mai 2010. Et il ne s'est finalement rallié qu'à reculons à l'austérité lorsque le spectre du défaut de paiement est réapparu à l'automne 2011.
Après de longs palabres et des tergiversations qui ont caractérisé une partie de son parcours politique, il consent alors à accorder le soutien de son parti au nouvel exécutif dirigé par l'ex-banquier central, Lucas Papademos. Mais il avait imposé que cette équipe de technocrates cède la main le plus vite possible. Sans relâche, il a par la suite réclamé des élections, sachant pertinemment qu'il en sortirait gagnant.
Une longue traversée du désert
Antonis Samaras, autant europhile convaincu que nationaliste et sécuritaire, fut à 26 ans l'un des plus jeunes députés à siéger au parlement, alors étoile montante du camp conservateur. Ex-ministre des Affaires étrangères, il quitte en 1992 le gouvernement par intransigeance nationaliste sur la question du nom de la Macédoine voisine, puis fait chuter sa propre majorité conservatrice avant de créer, comme l'explique Le Figaro, son parti "Le printemps politique", symbole d'une trahison contre-productive. L'économiste s'était auparavant signalé par des déclarations enflammées sur la minorité grecque du sud de l'Albanie.
Sa traversée du désert durera jusqu'en 2009, quand il emporte la présidence d'une Nouvelle Démocratie en lambeaux, qu'il avait réintégrée quatre ans plus tôt.
Antonis Samaras, homme courtois mais ombrageux, n'a depuis cessé de durcir ce parti sur les thèmes sécuritaires et d'immigration, y intégrant en février des cadres d'extrême-droite tout en ralliant aussi la centriste transfuge Dora Bakoyannis. "Il y a une masse d'immigrés, ils sont un million et demi qui n'ont pas de travail, qui n'ont rien à faire ici", a-t-il assuré, affirmant "compter sur la solidarité de l'Europe" pour mieux boucler les frontières et expulser les indésirables.
"Impossible de travailler avec lui"
Pour ses détracteurs au sein de la droite, Antonis Samaras, issu d'une famille bourgeoise qui a compté d'illustres écrivains ou hommes d'affaires, a alors non seulement trahi son camp, mais aussi démontré son irresponsabilité face aux enjeux géopolitiques majeurs qu'affrontait la Grèce.
"Saura-t-il dire aux Grecs : 'Mettez-vous au travail !', je ne le pense, hélas pas", déplore un analyste politique interviewé par Le Figaro.
Et pourtant, s'il était le favori de tous les bailleurs de fonds et acteurs internationaux doutant de la capacité de la Grèce à respecter ses engagements, ce père de famille de deux enfants et nouvel homme providentiel de la Grèce devra fixer sans tarder un cap ferme et crédible face à des échéances redoutables. Mais les doutes sont pugnaces. Lucas Papademos, l'ex-Premier ministre disait récemment de lui : "impossible de travailler avec lui. Un jour, il accepte votre programme de rigueur ; le lendemain, il le dénonce dans la presse".