Au Royaume-Uni, l'euroscepticisme est presqu’une tradition. Ses raisons sont à la fois historiques, identitaires, politiques et conjoncturelles, et elles amènent le pays à remettre sans cesse en cause sa relation avec l'Union européenne, jugée trop envahissante.
Margaret Thatcher, pourtant europhile à ses débuts, avait montré une hostilité croissante envers l'UE. Un positionnement qui avait fini par contribuer à sa chute. Mais aurait-elle été pour ou contre un "Brexit" ? Alors que David Cameron tente de convaincre l’UE de céder aux exigences de Londres, la question taraude nos voisins d’Outre-Manche.
Une vieille lettre refait surface. La question, purement théorique, déchire eurosceptiques et europhiles du Parti conservateur britannique. Chaque camp revendique l'héritage de la "Dame de fer". La bataille sur le positionnement supposé de l'ex-Première ministre s'est intensifiée ces dernières semaines Outre-Manche. Des conservateurs pro-Européens ont déterré une vieille lettre, écrite sept ans après que Margaret Thatcher eut quitté ses fonctions à la tête du gouvernement, dans laquelle elle dit : "La majorité des Britanniques veulent faire partie de l'Europe et moi aussi."
" La "Dame de fer" aurait "peut-être rugi plus fort" à Bruxelles que David Cameron "
Ce document était censé répondre à une autre missive, brandie cette fois par le vétéran eurosceptique Bill Cash et qui marquait l'opposition de Margaret Thatcher au traité de Maastricht renforçant l'intégration européenne. Bill Cash a souligné qu'il avait promis de ne rien divulguer de cette lettre datant de 1993 jusqu'à ce qu'émerge le doute, dans le débat politique, sur le fait que la "Dame de fer" était bien opposée au "projet européen".
La partie de ping-pong verbal au sein du parti conservateur, historiquement déchiré sur la question européenne, a été entamée par Lord Charles Powell, qui a été le plus proche conseiller de Margaret Thatcher. La "Dame de fer", écrivait-il récemment dans le Sunday Times, aurait "peut-être rugi plus fort" à Bruxelles que David Cameron. Mais en définitive, elle aurait "appuyé l'accord" négocié par l'actuel Premier ministre avec ses partenaires européens.
Si elle était encore vivante, elle dirait plutôt : "no, no, no". "Pas du tout", a aussitôt répliqué Norman Tebbit, ancien ministre sous Margaret Thatcher : "si elle était encore vivante, je pense qu'elle dirait plutôt : 'no, no, no'", a-t-il insisté, faisant allusion à sa célèbre réaction devant la Chambre des Communes (chambre basse du Parlement) en 1990 face aux propositions de Jacques Delors, alors président de la Commission européenne.
Qu'on revendique avec autant de hargne l’héritage de Margaret Thatcher, trois ans après sa mort et 26 ans après qu'elle a quitté le pouvoir, a l'air d'en navrer quelques-uns au sein du Parti conservateur. "C'est du grand n'importe quoi, on veut faire parler les morts", s'est ainsi insurgée la députée Anne Main, une eurosceptique notoire. Mais elle non plus n'a pu s'empêcher de se référer à un ancien discours de la "Dame de fer", dans lequel elle critiquait la "domination" de Bruxelles, pour indiquer la voie à suivre pour le référendum sur l'appartenance à l'UE promis par David Cameron d'ici à la fin 2017.