"Praljak n'est pas criminel de guerre, je rejette votre verdict !" Le Croate Slobodan Praljak, 72 ans, vient d'être condamné à 20 ans de réclusion pour avoir détruit le pont ottoman de Mostar dans la guerre contre les Bosniaques, en 1993-1994. Mais l'ex-chef militaire, carrure massive et visage buriné, a décidé de ne pas subir le verdict de la justice du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie de La Haye : il prend une petite fiole et en boit le contenu jusqu'à la dernière goutte, sous le regard médusé de l'ensemble du tribunal.
Watch as former Bosnian Croat military leader Slobodan Praljak appears to drink poison seconds after ICTY judges uphold his 20-year sentence pic.twitter.com/H4ThZK47Px
— AFP news agency (@AFP) 29 novembre 2017
Suspension de séance et départ en ambulance. La confusion envahit le tribunal. Le président du tribunal ne semble pas vraiment comprendre ce qui vient de se passer, jusqu'à ce que l'avocat confirme ce que beaucoup pressentent : il y avait du poison dans la fiole de Slobodan Praljak. Plus tard, le TPIY confirmera que Praljak est mort après avoir "bu du liquide". La séance est suspendue, les secours arrivent très vite, mais l'homme a bien ingurgité ce qui le tuera quelques heures plus tard, malgré un départ du tribunal en ambulance pour subir des soins. Le décès a été annoncé mercredi en début d'après-midi par plusieurs médias croates, dont la chaîne privée N1 et les principaux quotidiens Jutarnji List et Vecernji List.
Praljak being taken away from the #ICTY after drinking poison following his sentencing to 20 years for crimes against humanity in Bosnia pic.twitter.com/ffp8bPO4zQ
— André Harris (@AndreJ_Harris) 29 novembre 2017
"Entreprise criminelle commune". Cet ingénieur devenu directeur de théâtre n'était pas un militaire à l'origine, mais la guerre venue, il a vite gravi les échelons des forces croates. Comme cinq autres responsables de la République croate d'Herceg-Bosna, il a été reconnu coupable d'une "entreprise criminelle commune" pour imposer une domination croate, en usant de l'épuration ethnique dans les zones que leurs forces contrôlaient.
Mais pour de nombreux Croates, il reste un héros. La semaine dernière, la présidente Kolinda Grabar-Kitarovic avait rédigé un message d'hommage, lu lors d'une promotion d'un ouvrage en son honneur, "Général Praljak". "La contribution du général Slobodan Praljak a été d'une immense importance à la fois pour la défense de la Croatie et de la Bosnie contre l'agression 'grand serbe' et pour la survie du peuple croate sur son territoire historique durant la guerre patriotique", avait déclaré la présidente.
Le Premier ministre croate dénonce une "injustice"
Lors d'une conférence de presse en fin d'après-midi, le Premier ministre croate a adressé ses "sincères condoléances" à la famille de Slobodan Praljak, tout en dénonçant une injustice : "Son geste dont nous avons malheureusement tous été les témoins aujourd'hui, illustre surtout la profonde injustice morale envers les six Croates de Bosnie."