Mercredi prochain auront lieu des élections législatives aux Pays-Bas. Un scrutin qui sera observé de près par tous les Européens, et particulièrement en France, à quelque semaines de notre présidentielle. En Hollande, le populiste Geert Wilders fait la course en tête.
L’élection va notamment se jouer dans les banlieues dortoirs de grandes villes comme Rotterdam ou Amsterdam. C’est là que se trouvent les plus gros bataillons d’électeurs tentés par le vote d’extrême-droite. Pour tenter de saisir ce qui s’y passe, Europe 1 est parti à Spaïkenisse, une commune de plus 70.000 habitants, à la lisière du grand port de Rotterdam. Ces derniers jours, Geert Wilders l’avait choisie pour l’une de ses très rares apparitions publiques. Et Europe 1 était là.
"Rendez-nous les Pays-Bas !" C’est jour de marché à Spiikenisse. Au pied de l’église, les habitants remplissent les sacoches de leurs vélos. Ils achètent de grosses tranches de gouda, du poisson ou encore des tulipes. Parmi eux, des militants du PVV distribuent des tracts. On y lit le slogan du parti de la liberté "Nederland weer von ons", "Rendez-nous les Pays-Bas !"
Pieter compte parmi ces partisans motivés de Geert Wilders : "aujourd’hui, la clé de notre pays est à Bruxelles.70% des décisions qui affectent les Pays-Bas sont prises à Bruxelles. Lui, il va ramener la clé pour que ce soit à La Haye qu’on prenne les décisions", explique-t-il. Pieter et ses camarades se sont donné rendez-vous au marché pour accueillir leur héros. Wilders sort très peu, il est constamment sous protection policière. Mais aujourd’hui, il est là. Une cohue de journalistes l’entoure. Ses fans, eux, tentent le selfie avec l’homme à la crinière peroxydée.
"L’idéologie islamique ne doit plus être présente aux Pays-Bas". Comme souvent, le chef du PVV a préparé une petite provocation. Il lance des attaques contre la "racaille marocaine". Et s’en prend encore une fois l’Islam : "je ne crois pas que l’Islam soit une religion, c’est une idéologie et il faut le traiter en tant que telle. L’idéologie islamique ne doit plus être présente aux Pays-Bas, parce que sinon nous ne serons plus un pays libre. Regardez comment je dois faire campagne ! Je suis l’un des rares hommes politiques qui osent parler franchement des dangers de l’Islam. Résultat, je dois déjà repartir, selon ce que me disent mes gardes du corps… ‘"
Et quelques formules choc plus tard, le président du PVV est effectivement exfiltré très vite. Mais Willem n’est pas déçu : "je suis toujours là quand il vient. C’est un homme à part. Il est très franc, il dit les choses clairement, il ne lâche jamais. C’est pour ça que je dis, ‘c’est mon homme’. Les gens ici travaillent dur, ils n’ont veulent pas qu’on leur raconte d’histoire. Par exemple, s’ils voient de la nourriture halal dans un magasin, ils disent ‘je ne veux pas ça, je veux ma nourriture’. Lui, il les comprend".
"Il y a un malaise à cause des réfugiés". Comme beaucoup d’habitants de Spijkenisse, Willem travaille pour le géant pétrolier Shell, dont les installations sont visibles de l’autre côté du la Meuse. Ici, le chômage est dans la moyenne nationale, le nombre d’immigrés aussi. Au marché, on ne croise que quelques femmes voilées. L’essentiel de la population sont des employés ou des ouvriers, qui travaillent dur, la nuit parfois, sur les installations du port.
Cette population, Jan van der Dikj la connait bien, lui qui est élu au conseil municipal. Il appartient au principal parti d’ici, un parti local sans étiquette. Ces dernières semaines, il a beaucoup discuté avec ses concitoyens pour saisir comment pourquoi sa ville a pu devenir un bastion du PVV : "globalement, ils ne sont pas satisfaits de ce qui se passe. Il y a un malaise à cause des réfugiés. Les gens pensent ‘ils vont me prendre mon travail, moi je dois attendre pour avoir un plus grand logement, parce qu’on doit les loger eux’. Il y a le chômage, ou plutôt il y avait du chômage pendant la crise ces dernières années. Ils ont peur de l’avenir. Tout ça parce qu’ils écoutent les promesses de Wilders, c’est pour ça qu’ils votent pour lui".
"Le PVV est le seul parti qui a gardé le contact avec le peuple". Mais au-delà des classes populaires, le discours de Wilders séduit désormais aussi à des électeurs plus riches et plus éduqués. Comme Jan, qui a fait une carrière d’entrepreneur à l’étranger et qui veut retrouver les Pays-Bas "d’avant" : "le PVV est le seul parti des Pays-Bas qui a gardé le contact avec le peuple. Les autres partis sont très élitistes. Et pourtant, dans certains quartiers, là où les musulmans sont majoritaires, les homosexuels ne peuvent plus se tenir la main. Et si les filles sont en mini-jupes elles se font cracher dessus et on les traite de prostituées".
En 2014, la ville de Spijenisse avait voté à 28% pour le parti de Geert Wilders, un des scores les plus élevés du pays. Cette fois, il devrait obtenir encore plus de voix.