Face au tollé soulevé par les menaces d'expulsion pesant sur des immigrés de longue date originaires des Antilles, la Première ministre Theresa May a été contrainte de s'excuser mardi auprès des dirigeants de ces pays venus au sommet du Commonwealth à Londres.
"Je veux m'excuser auprès de vous aujourd'hui. Nous sommes vraiment désolés de la moindre anxiété causée", a dit Theresa May lors d'une réunion organisée à la hâte à Downing Street avec douze dirigeants antillais pour parler de cette question qui menaçait de ternir le sommet des 53 pays membres du Commonwealth.
“I take this very seriously. The Home Secretary apologised to the House of Commons yesterday for any anxiety caused and I want to apologise to you today.” – PM @Theresa_May on meeting Caribbean Commonwealth leaders pic.twitter.com/iT7ynjAcLc
— UK Prime Minister (@10DowningStreet) 17 avril 2018
Traités comme des immigrés illégaux. Le gouvernement britannique a provoqué la colère au Royaume-Uni et aux Antilles pour son traitement d'immigrés arrivés au Royaume-Uni entre 1948 - quand le Windrush, premier bateau avec à bord des immigrants des Caraïbes, a débarqué près de Londres - et le début des années 1970. Invités à venir reconstruire le pays après la Seconde Guerre mondiale, ils avaient obtenu le droit de rester indéfiniment, d'autant que certains d'entre eux avaient la nationalité britannique car nés pendant la période coloniale. Mais ceux qui n'ont jamais réclamé de papiers d'identité en bonne et due forme se retrouvent désormais traités comme des immigrés illégaux et courent le risque d'être expulsés s'ils ne fournissent pas de preuve pour chaque année de présence au Royaume-Uni.
Intervention du Premier ministre jamaïcain. Soulignant que les personnes concernées "ont significativement contribué à la construction et à l'enrichissement de ce pays" et méritent "leur place de citoyens", le Premier ministre jamaïcain Andrew Holness a réclamé une réponse "rapide" à cette situation. À son arrivée à Downing Street, le Premier ministre de la Barbade Guy Hewitt a déclaré : "Nous sommes maintenant en mode discussion. Le gouvernement nous a entendus". Au Parlement, c'est le député David Lammy (Labour) qui s'est exprimé sur le sujet :
Une partie des cartes d'enregistrement détruites en 2010. Londres a écrit à chacun des gouvernements concernés pour leur expliquer comment il comptait remédier au problème, notamment en aidant les personnes concernées à trouver les documents nécessaires pour régulariser leur situation. Il a aussi promis de les exonérer du coût lié à l'établissement d'une carte de résidence et de leur "rembourser les frais juridiques raisonnables" engagés. Mais un autre embarras a surgi mardi, lorsque le ministère de l'Intérieur a admis avoir décidé en 2010 de détruire une partie des cartes d'enregistrement stipulant la date d'arrivée de ces migrants au Royaume-Uni.
57.000 personnes seraient concernées. Les difficultés ont surgi ces dernières années pour les citoyens originaires des Antilles présents de longue date en raison de l'introduction par Theresa May (ministre de l'Intérieur de 2010 à 2016) de mesures destinées à lutter contre l'immigration illégale. Parmi elles, la nécessité de produire des preuves de résidence pour toutes les années de présence pour obtenir un emploi, louer un appartement ou accéder au système de santé. Selon le président de l'association d'aide aux migrants Joint Council for Welfare of Immigrants (JCWI), Satbir Singh, 57.000 personnes seraient concernées. "Ils ont travaillé peut-être 40, 50 ans, ils ont eu des enfants, des petits-enfants, ont payé leurs impôts et soudain, lors d'une interaction de routine avec le gouvernement - pour obtenir un permis de conduite, un nouveau bail -, quelqu'un s'aperçoit qu'ils n'ont pas la bonne paperasse et le ministère de l'Intérieur les classe immédiatement comme sans-papiers", a-t-il dit.
Le scandale a aussi suscité l'inquiétude sur la capacité de Londres à gérer les cas de millions de citoyens de l'Union européenne qui vivent actuellement au Royaume-Uni et souhaitent y rester après le Brexit l'an prochain. Le gouvernement britannique a accepté qu'ils puissent rester indéfiniment à condition de réclamer un nouveau statut.