Cette semaine se déroule à Pékin le 19ème Congrès du Parti communiste chinois, à l'issue duquel le président Xi Jinping, 64 ans, devrait voir son mandat de cinq ans renouvelé. L'occasion pour Europe 1 de dresser le portrait de cet homme de fer qui domine l'Asie.
La "Pensée Xi Jinping du socialisme à la chinoise de la nouvelle ère"
Ce concept a été proclamé par l'agence de presse Chine nouvelle à l'issue du discours fleuve de trois heures et demie donné par le président aux 2.300 membres du Parti communiste présents au Congrès mercredi. Xi Jinping y a évoqué "une nouvelle ère" du socialisme à la chinoise, brossant le tableau d'une grande puissance prospère et respectée à l'horizon 2050, mais sans laisser la moindre ouverture à une libéralisation du régime.
Sa "Pensée" pourrait faire officiellement son entrée dans la charte du PCC au terme du congrès, avec ou sans son nom écrit noir sur blanc. Depuis Mao, aucun dirigeant chinois n'avait vu sa contribution à l'idéologie communiste entrer dans la charte du parti au pouvoir alors qu'il était encore en fonction. Xi Jinping a par ailleurs été élevé au rang de "leader central" en 2016, un honneur réservé jusque-là seulement au fondateur du régime, Mao Tsé-Tung.
Xi Jinping, ce chantre de l'anti-corruption
Pendant son premier mandat de cinq ans, Xi Jinping a mis en place un grand ménage. Installé à la tête du parti en 2012, le président chinois s'est rapidement lancé dans une campagne de lutte contre la corruption qui gangrenait en particulier la fonction publique et le PCC. Au total, pas moins de 1,3 million de cadres ont été sanctionnés. Et aucun secteur n'a été épargné, des instances du parti au sommet de l'armée, en passant par les grandes entreprises.
Le président du Club Med a ainsi mystérieusement disparu en décembre 2015, tout comme le patron de China Telecom quelques jours plus tard. Les autorités avaient alors justifié cette "disparition" par de "graves violations de la discipline" dont il se serait rendu coupable, une expression couramment utilisée dans les affaires de corruption.
Et Xi Jinping n'a pas non plus hésité à intriguer pour conserver sa place à la tête du Parti communiste chinois et donc au sommet de l'État. Le jeune Sun Zhengcai, alors secrétaire du parti de Chongqing, considéré comme trop ambitieux, a été écarté de la scène politique en juillet dernier, accusé lui aussi de "grave violation à la discipline", rapporte le magazine économique Challenges. Il a été rapidement remplacé par un protégé du président qui briguait un second mandat.
En 2016, les procès pour corruption ont atteint un record en Chine avec pas moins de 45.000 affaires traitées dans l'année, impliquant 63.000 personnes, une augmentation d'un tiers par rapport à l'année précédente. Toujours en 2016, la Chine était au 79ème rang du classement mesurant la perception de la corruption, elle a gagné un rang depuis 2012, rappelle Les Echos.
Une mainmise puissante sur ses voisins
La Chine, première puissance économique mondiale, domine largement ses voisins asiatiques, à commencer par les territoires aux statuts particuliers comme Hong-Kong et Taïwan. Le premier est un territoire rétrocédé à la Chine par le Royaume-Uni en 1997. À cette époque-là, les trois parties s'étaient entendues sur le principe de "un pays, deux systèmes". Mais en septembre 2014, la colère grondait au sein des Hongkongais pour donner naissance au "mouvement des parapluies".
Les sept millions habitants de ce petit territoire se sont révoltés contre une trop grande ingérence de Pékin dans les affaires locales, selon eux. La répression de Pékin a été violente et le gouvernement chinois n'a rien cédé. Le futur dirigeant de l'exécutif hongkongais sera élu par un collège de grands électeurs loyal à Pékin en 2017 et non au suffrage universel, comme le réclamaient les habitants de la cité-État.
Quant aux relations de la Chine avec Taïwan, elles se sont réchauffées depuis que Ma Ying-jeou a été élu à la tête du pays en 2008 (et réélu en 2012). L'opinion publique dans cette île est néanmoins devenue hostile à des relations plus étroites avec la Chine, craignant qu'elle n'exerce une influence croissante à Taïwan. D'ailleurs, la Chine considère toujours Taïwan comme une partie de son territoire national. Pékin a toujours revendiqué sa souveraineté sur l’île, où les nationalistes chinois s’étaient repliés en 1949 quand ils ont été chassés du pouvoir par les communistes de Mao. Et si les échanges économiques ont largement repris, les drapeaux de Taiwan sont systématiquement floutés à la télévision.
#Madonna waved a Taiwanese flag at her concert in Taipei last nite. How many hours before China bans her? # #台灣pic.twitter.com/aemzZQaTf8
— Lionel Piguet (@lionelpiguet) 5 février 2016
Le nouveau pouvoir en place depuis janvier dernier, le parti démocrate progressiste, a refusé de reconnaître le principe, essentiel aux yeux de Pékin, d’une seule Chine, une sorte de statu quo, auquel les deux rives du détroit s’en étaient tenues depuis 1992. Ce qui n'empêche pas la Chine de continuer d'isoler l'île par ailleurs complètement dépendante économiquement du continent.
Xi Jinping n'aime pas les réseaux sociaux
Bien que Xi Jinping ait prôné une plus grande ouverture envers l'étranger, il compte bien garder un certain contrôle sur l'Internet chinois. Le web chinois est l'un des plus censurés du monde : un grand nombre de sites Internet étrangers, et non des moindres (Google, Facebook, Instagram, YouTube, Dailymotion...), ne sont pas consultables.
Quant aux libertés en ligne, elle sont bien moindre que celles dont jouissent les Occidentaux. Par exemple, la Chine a interdit à partir de janvier 2016 aux entreprises étrangères toute "publication en ligne", selon des règlements officiels. Une nouvelle initiative visant à contenir les médias et l'influence occidentale dans le pays. En juillet dernier, Pékin avait ordonné aux grands groupes technologiques de fermer les sites publiant des informations politiquement sensibles, des "mauvaises interprétations" des directives du pouvoir et autres "déformations" de l'histoire du Parti. Et depuis le 1er octobre, les autorités chinoises ont encore durci les règles de fonctionnement des réseaux sociaux et sites d'information, exigeant de la part des internautes qu'ils dévoilent leur identité pour pouvoir poster des commentaires en ligne.
L'exemple le plus parlant de cette censure en ligne est sans doute la polémique autour de Winnie l'Ourson en juillet dernier. L'innocent personnage britannique a vu toutes les images bannies des réseaux sociaux chinois et des bibliothèques. On lui reprochait d'avoir servi de comparaison peu flatteuse avec le président. Toutes ces images ont été déclarées "contenu illégal". Autant d'éléments qui rappellent que malgré sa puissance économique et militaire, la Chine reste un pays où règne la répression, une perspective que Xi Jinping ne semble pas avoir l'intention de changer.
A bear, however hard he tries, Falls foul of Chinese censors' eyes https://t.co/7HEDemzB3ipic.twitter.com/CVEs60nzlm
— Financial Times (@FT) 16 juillet 2017