C'est une rentrée sans véritable éclat pour les "gilets jaunes". Ils étaient 6.000 à s'être rassemblés samedi dans toute la France, dont 2.500 à Paris. Quelques heurts ont éclaté et 147 personnes ont été placées en garde à vue. Pour Jean-François Amadieu, professeur à l'université de Paris Panthéon-Sorbonne et spécialiste des mouvements sociaux, il s'agit de la confirmation d'un enlisement du mouvement, causé par plusieurs phénomènes.
Un véritable "rejet" des leaders
Il y a d'abord "l'effet Covid-19" qui est, aux yeux du sociologue, "clair". "De toute façon, les niveaux de participation au mouvement de ce samedi sont similaires à ce qu'on a déjà observé" lors des précédentes manifestations, explique-t-il. Les niveaux de mobilisation des derniers "actes" se situent en effet très loin du premier samedi de rassemblement, le 17 novembre 2018. Ce jour-là, les mécontents étaient plus de 282.000 dans toute la France.
Mais il y a un autre facteur qui participe à "affaiblir" le mouvement : "Dès que des porte-parole ou des leaders paraissent s'imposer et veulent s'engager politiquement, il y a une sorte de rejet par toute une partie de la base des 'gilets jaunes'", souligne Jean-François Amadieu. "On l'a vu avec l'épisode Jean-Marie Bigard", pris pour cible et exfiltré de la mobilisation dans la matinée, sur fond de vives tensions avec une figure du mouvement, Jérôme Rodrigues.
"Très forte dégradation" de l'emploi
"Par ailleurs, il y a la question de la très forte dégradation de la situation sur le front de l'emploi", poursuit l'universitaire. "Cela peut être paradoxal, mais il faut bien voir que lorsque les gens sont inquiets pour leur emploi, ce n'est pas le moment le plus propice aux mobilisations."
Ces différents facteurs conduisent Jean-François Amadieu à penser qu'"il n'y a pas de rebond qui apparaisse et qui puisse apparaître pour ce mouvement". Cela signifie-t-il pour autant que la contestation sociale sera moins forte et affirmée que lors des automnes 2018 et 2019 ?