L'un des leaders des "gilets jaunes", Jérôme Rodrigues, a été gravement blessé à l’œil samedi après-midi, place de la Bastille à Paris. Ce proche d'Éric Drouet parle d'un tir de lanceur de balles de défense (LBD), quand les premiers éléments de l'enquête tendent plutôt vers l'explosion d'une grenade de désencerclement.
Une vidéo en direct. Samedi vers 16h45, la tension monte place de la Bastille entre manifestants "gilets jaunes" et forces de l'ordre. Les premières constatations des enquêteurs montrent qu'une grenade de désencerclement explose alors juste aux pieds de Jérôme Rodrigues, ce qui apparaît d'ailleurs clairement sur la vidéo qu'il était en train de réaliser et de diffuser en direct sur Facebook, au moment de l'accident. On y voit distinctement l'explosion au sol, et, immédiatement, l'homme s'effondre, visiblement touché à l'œil droit. "Médic, médic, médic. [...] En plein œil... Appelez les médics !", entend-on hurler à l'image, devenue fixe et cadrée sur le sommet de la colonne de la Bastille. Le blessé sera finalement pris en charge par les pompiers et évacué vers l'hôpital.
Jérôme Rodrigues: "je vais perdre mon oeil la famille" pic.twitter.com/3vG5I3frn1
— Vincent Glad (@vincentglad) 26 janvier 2019
Une blessure caractéristique, selon son avocat. Mais Jérôme Rodrigues estime lui avoir subi un tir de LBD. "Tout se passe très vite. On me lance une grenade et je me prends une balle. J'ai été doublement attaqué. Une grenade au pied et la balle", a-t-il d'abord assuré à LCI. D'après son avocat, ce n'est donc pas la grenade qui aurait provoqué la blessure, mais bien le tir d'une balle de défense au même instant. "Les éclats de la grenade sont en plastique et font trois à quatre centimètres de diamètre. Si vous regardez la marque à l'œil, vous voyez très bien que c'est plus un flashball que l'éclat en caoutchouc d'une grenade", soutient sur Europe 1 maître Philippe de Veulle.
"J'ai d'autres témoignages qui sont moins directs mais beaucoup de gens ont vu le tir de flashball", assure l'avocat, qui ajoute qu'une balle de défense a été ramassée sur place par les proches de Jérôme Rodrigues et qu'elle sera remise aux enquêteurs pour être analysée.
Plainte déposée. Lors d'une conférence de presse organisée à l'hôpital Cochin, où il est hospitalisé, le blessé a aussi indiqué s'être entretenu avec "la police des polices" pendant près de deux heures. "L'IGPN m'a confirmé que sur les vidéos qui ont été vues il y a bien le 'boom' de la grenade et le 'poc', qui suit derrière, du tir de LBD", a-t-il dit. Jérôme Rodrigues a déclaré avoir porté plainte contre X, contre Christophe Castaner, le ministre de l'Intérieur, et contre le chef de l'État Emmanuel Macron.
Le policier à l'origine du tir identifié. Mais pour l'heure, la thèse d'un tir de LBD simultané à l'explosion de la grenade n'est pas corroborée. Le secrétaire d'État à l'Intérieur, Laurent Nunez, a d'ailleurs affirmé dimanche sur LCI qu'il n'y avait "aucun élément" permettant d'affirmer que Jérôme Rodrigues avait été touché par un tir de LBD. Il a en revanche confirmé l'utilisation d'une grenade de désencerclement au même moment, s'appuyant sur le rapport d'un policier ayant lancé ce projectile. D'après des informations d'Europe 1, celui-ci s'est signalé immédiatement. Il va devoir s'expliquer devant l'IGPN, chargée de faire la lumière sur les circonstances de cette blessure.
Appel au calme. Jérôme Rodrigues,lui, va devoir rester cinq jours à l'hôpital pour éviter une infection à l’œil. "Il faut attendre que l'hématome se résorbe pour déterminer si ma vision est toujours opérationnelle ou pas", a-t-il indiqué. Il a aussi précisé s'être mis d'accord avec Éric Drouet pour lancer "un appel au calme" mais "renforcer les actions, sans violence". "Je ne lâcherai pas, je serai à des manifs dès que mon état me le permettra", a-t-il assuré.