Ces "gilets jaunes" qui veulent passer Noël sur un rond-point

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Martin Feneau, édité par Grégoire Duhourcau , modifié à
La période des fêtes n'altère pas la détermination des "gilets jaunes". Certains s'organisent déjà pour réveillonner sur le rond-point qu'ils occupent. C'est le cas notamment à Feyzin, près de Lyon.

Une vingtaine de "gilets jaunes" s'apprête à réveillonner sur un carrefour à Feyzin, près de Lyon, où un petit sapin de Noël a été planté au milieu du rond-point. Et comme Sarah, retraitée, ils sont nombreux à vouloir réveillonner sur place. "On ne s'arrêtera pas ! On passera Noël là, le jour de l'An là, on va apporter à manger là, on va faire notre fête là. On ne rentre pas chez nous !", assène-t-elle avec détermination au micro d'Europe 1.

"Je suis 'gilet jaune', je reste avec les 'gilets jaunes'". Le groupe a déjà commencé à s'organiser. Un abri a notamment été construit sur le bas-côté. Il y a des lits, des canapés, un poêle à bois pour se chauffer… "Madame habite là. Elle se bat pour avoir un logement", explique Sarah en présentant une femme "gilet jaune" qui vit dans cet abri. "Je vis dans un foyer depuis 12-13 ans", confie cette dernière. "J'ai des petits-enfants, je ne peux pas les recevoir chez moi." Elle passera donc les fêtes sur ce rond-point avec d'autres "gilets jaunes". "Pourquoi je les (les réveillons) passerai toute seule ? Je suis 'gilet jaune', je reste avec les 'gilets jaunes'. On a créé des liens, on se bat ensemble."

Plus que d'une communauté, les "gilets jaunes" présents sur ce rond-point parlent d'une famille. Pour James, 48 ans, c'est presque devenu un besoin de se retrouver ici pour partager les difficultés de la vie, le combat pour plus de pouvoir d'achat. "Je suis enseignant. Je touche deux fois le Smic", explique-t-il. "Quand j'ai payé mon crédit, etc., il ne me reste plus rien. Il y a trois ans, je suis allé en vacances grâce à mes parents qui m'ont payé mes vacances. Je ne vis plus, je survis en résistant. La résistance est un moyen d'exprimer sa colère et de vivre."

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"Il ne faut pas lâcher le morceau". C'est un vrai repas de Noël qui se prépare sur ce carrefour. Certains disent qu'ils vont amener des toasts, du poulet pour le plat. Il y a même des habitants du coin qui ont prévu d’apporter des gâteaux. "Je ne passerai pas le réveillon avec eux, mais je viendrai les voir, les soutenir, leur apporter quelque chose. Disons qu'il ne faut pas lâcher le morceau. Ce ne sont pas les trois miettes qu'ils (le gouvernement et l'exécutif) nous ont données qui vont nous satisfaire, il faut tenir dans la durée", confie l'un d'eux. "Les gens qui sont sur ces camps n'ont peut-être pas forcément les moyens de faire des cadeaux à leurs proches. De toute façon, les gens n'arrivent pas à finir le mois donc Noël a perdu de son sens", ajoute une autre.

Et en ce qui concerne une éventuelle intervention des forces de l'ordre (deux policiers sont sur ce carrefour et des patrouilles se relaient 24 heures sur 24), ces "gilets jaunes" disent ne pas craindre d'être délogés de leur rond-point. Et si cela devait arriver, ils disent vouloir s'installer ailleurs.

Des déclarations à rebours des vœux du gouvernement, qui souhaite la libération prochaine les ronds-points, de façon pacifique si possible. Un appel au "calme" relayé sur Europe 1, lundi, par le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger.