C'était il y a un an, le mouvement en forme d'ovni social des "gilets jaunes" venaient de prendre forme. Pour fêter cet anniversaire marquant le début de la contestation, le 17 novembre 2018, des manifestations sur prévues samedi et dimanche. Moins de 15 jours après les premières occupations des ronds-points, Europe 1 avait décidé de poser ses valises pendant une semaine à Mourenx, dans les Pyrénées-Atlantiques, pour comprendre les ressorts de la colère qui animait les "gilets jaunes".
>> Cette commune de 7.000 habitants a été le QG de la rédaction d'Europe 1 car elle rassemblait nombre de problématiques dénoncées par le mouvement : peu de transports en commun, une classe moyenne qui avait le sentiment d'être déclassée...Un an plus tard, alors qu'Emmanuel Macron a débloqué 10 milliards d'euros pour revaloriser la prime d’activité, financer une prime exceptionnelle en fin d’année et défiscaliser les heures supplémentaires, les choses ont-elles changées à Mourenx ? Un an après, notre journaliste est retourné sur place pour faire un bilan.
"On survit"
Pour les habitants de cette petite commune, les mesures d'Emmanuel Macron n'ont eu aucun impact. Déjà, le prix de l'essence, première raison de la colère, a perdu à peine 10 centimes du litre. Et à côté, les charges dénoncées par les commerçants par exemple, n'ont pas vraiment bougé. "On est toujours aussi en colère", affirme Hélène au micro d'Europe 1. "Ce qui a changé depuis l'année dernière, ça a été ma taxe de location : moins 23 euros sur l'année. C'est tout. Après le gaz a augmenté, et mon salaire n'a pas bougé", explique cette gérante d'une épicerie de Mourenx.
Et quand on lui fait réécouter son témoignage recueilli en 2018, elle est catégorique : "On ne vit pas, on survit. Je suis de plus en plus obligée de manger mes invendus. De toute façon, les 'gilets jaunes' n'ont rien changé. Ils ont essayé c'est vrai...mais bon, ce n'est pas de leur faute, c'est celle de l'Etat !".
"Très peu de gens ont été concernés par cette histoire de prime d’activité"
L'autre phénomène qui ressortait à Mourenx, c'était le désarroi de la classe moyenne : ce sentiment qu'un emploi correct, stable, ne suffit plus toujours. Lui non plus n'a pas changé. "Je dois être à 1.600 euros par mois", raconte au micro d'Europe 1 Maryline, qui tient une agence immobilière. "Quand vous avez des enfants qui sont étudiants, ce n'est pas suffisant. Parce que financièrement une fois que vous avez payé le loyer, que vous faites vos courses, qui ont augmenté elles aussi, il ne reste pas grand-chose à la fin du mois". Les mesures d'Emmanuel Macron ? Elle les balaie : "Très peu de gens ont été concernés par cette histoire de prime d’activité, et pas moi".
Quant à la défiscalisation des heures supplémentaires, la réponse n'est pas meilleure, "Absolument rien ! La classe moyenne s’appauvrit terriblement. Et si on continue comme ça, on n’aura plus bientôt de classe moyenne."
Et les nouvelles ne sont pas meilleures du côté de Noël, ce retraité qui avait été obligé de reprendre une activité de boulanger pour arrondir sa trop petite pension, a dû fermer au printemps faute de clients. Mais si les choses sont encore devenues plus dur pour lui, il a toujours son gilet jaune bien en vue sous le pare-brise de sa voiture. "Ça a quand même changé les choses dans les mentalités, il y eu une prise de conscience et de vouloir-faire du président. Maintenant, changer les réalités c'est hyper long. Il faudrait que ça accélère pour ne pas laisser les gens sur le côté.", analyse-t-il.
Comme beaucoup, Noël espère voir le mouvement reprendre de la vigueur à l'occasion de cet "anniversaire", la semaine dernière la manifestation des "gilets jaunes" la plus proche de Mourenx a rassemblé tout juste 60 personnes, dans les rues de Pau.
Retrouvez les quatre jours de reportages faits à Mourenx au début du mouvement des "gilets jaunes" :
Jour 1 :
Noël, 70 ans, a créé son épicerie : "Ça marche, mais pas assez pour me sortir un salaire"
La colère des 'gilets jaunes' ressentie ici "peut-être plus qu'ailleurs"
L'inexorable sensation, chez les habitants, que "tout augmente"
Jour 2 :
Comment Mourenx, 6.500 habitants, aide ses demandeurs d'emploi à se déplacer pour trouver du travail
"On attend qu'Emmanuel Macron soit plus près de nous"
Le discours d'Emmanuel Macron n'a pas apaisé ces "gilets jaunes" : "On ne peut plus le voir !"
Jour 3 :
Le combat de la mairie pour maintenir en vie les commerces de centre-ville
Un garage solidaire pour aider les travailleurs précaires
Jour 4 :
Les anciens sont nostalgiques de l'époque où le racisme n'existait pas