Si plusieurs manifestations des "gilets jaunes" prévues samedi ont été déclarées, les autorités craignent un mouvement spontané de bien plus grande ampleur et évoquent un "risque sécuritaire". "Environ 1.500 actions sont attendues sur le territoire et seulement un peu plus d'une centaine auraient été déclarées", selon une source policière.
Depuis trois semaines, la colère gronde en effet chez les automobilistes. En cause : les prix des carburants qui se sont envolés à la pompe. Alors que l’exécutif a prévu d’augmenter les taxes sur l’essence et le diesel en 2019, pour financer la transition écologique, une partie des Français s’organise derrière une bannière commune, "les gilets jaunes". Ils souhaitent mettre en place des blocages dans tout le pays le 17 novembre.
Qui sont les "gilets jaunes" ?
A l’instar du bonnet rouge, signe de ralliement des opposants aux portiques écotaxe en Bretagne en 2013, le gilet jaune fait office d’étendard pour les automobilistes en colère. Obligatoire dans tous les véhicules, ce gilet fluorescent est désormais exhibé fièrement par nombre d’automobilistes derrière leur pare-brise. Ils protestent ainsi contre l’augmentation du prix des carburants à la pompe. Selon l’Union française des industries pétrolières, le litre de SP95 coûtait en moyenne 1,54€ fin octobre et le litre de diesel 1,51€, en hausse respectivement de 14% et 22% en un an. Les automobilistes critiquent avec virulence le gouvernement qui a décidé d’une nouvelle hausse des taxes au 1er janvier (6,5 centimes par litre de gazole et 2,9 centimes par litre d’essence).
DÉCRYPTAGE >> Pourquoi les prix des carburants augmentent-ils autant ?
Comme l’explique Libération, l’appel initial à manifester le 17 novembre a été lancé sur Facebook par deux chauffeurs routiers de Seine-et-Marne, le 10 octobre. Leur événement, intitulé "Blocage national contre la hausse du carburant", a rapidement été relayé sur les réseaux sociaux et rassemble à présent 200.000 personnes "intéressées". En parallèle, d’autres événements ont été créés pour appeler à des blocages nationaux et locaux, les organisateurs étant parfois en lien les uns avec les autres, précise Libération.
Ce #GiletJaune sera le bonnet rouge des automobilistes ruraux et provinciaux, otages de ce racket fiscal aux accents pseudo-écologiques... #RasLeBolFiscalpic.twitter.com/XkPENBRrlt
— Binbin ن #Faire (@binbin59300) 26 octobre 2018
Qu’est-il prévu le 17 novembre ?
Le mot d’ordre de la journée du samedi 17 novembre est clair : "Bloquons tout !". Pour faire pression sur le gouvernement, les automobilistes mobilisés appellent à bloquer des routes et des autoroutes dans toute la France, par le biais de manifestations et d’opérations escargot. Un site a été créé pour l’occasion afin de recenser toutes les actions organisées le 17 novembre. Pour savoir s’il y a un rassemblement près de chez vous, une carte interactive a été créée par les administrateurs du site.
De premiers événements "tests" ont déjà été organisés, notamment dans le Jura. À l’appel d’un collectif formé sur les réseaux sociaux, environ 500 véhicules de particuliers, de chauffeurs routiers ou d’agriculteurs se sont rassemblés à Dole. Le succès de cette mobilisation anticipée laisse penser que le 17 novembre pourrait rassembler beaucoup de monde.
Le mouvement est-il politique ?
La question se pose depuis les premières formes d’expression de la colère des automobilistes. En effet, l’une des figures de la contestation sur Internet est Fabien Buhler, auteur de plusieurs vidéos sur le sujet, la première le 23 octobre. Membre du parti Debout la France de Nicolas Dupont-Aignan, il se décrit lui-même comme un "de ceux qui portent la parole de Patriosphère". Considéré comme une des personnes à l’origine du mouvement, Franck Buhler a, en réalité, pris le train en marche. Toutefois, ses vidéos ayant été vues plusieurs millions de fois, il a joué le rôle de caisse de résonance pour les "gilets jaunes".
Griveaux dénonce une "instrumentalisation". S’il n’est pas ouvertement politique, l’appel du 17 novembre a toutefois reçu le soutien de plusieurs personnalités, à commencer par Nicolas Dupont-Aignan et Marine Le Pen. "L'ensemble de nos élus et délégués départementaux, de nos fédérations, rejoindront la contestation qui est en train d'émerger", a annoncé fin octobre Marine Le Pen, sur Europe 1. En revanche, Les Républicains et le Parti socialiste ont pris leurs distances avec cette journée d’actions. Par la voix de son porte-parole Benjamin Griveaux, le gouvernement a, lui, dénoncé "l’instrumentalisation" de la manifestation du 17 par l’extrême droite.
La position de La France insoumise est plus floue. En meeting à Lille le 30 octobre, Jean-Luc Mélenchon avait qualifié la colère des automobilistes de "juste et digne" mais s’inquiétait de la présence de "fachos" au sein du mouvement. Sur Facebook, François Ruffin a expliqué "comprendre" le "sentiment d’injustice fiscale" mais a rappelé le besoin de sortir des énergies fossiles. Clémentine Autain, pour sa part, refuse de se joindre aux cortèges pour ne pas "défiler avec Marine Le Pen".