"C'est un des gros enjeux de l'industrie de la mode pour la décennie à venir : une mode plus éthique, plus responsable", assure Farid Chenoune, historien de la mode. Au micro de Wendy Bouchard, et accompagné de Patricia Romatet, directrice des études à l'Institut Français de la Mode, en pleine Fashion week parisienne, les deux experts dévoilent les dessous d'un changement de mentalité dans un milieu de strass et de paillettes.
Pourquoi ? Parce que les consommateurs le demandent !
"Le marqueur de décision d'achats s'est déplacé du côté des consommateurs", analyse Farid Chenoune au micro d'Europe 1. "Les consommateurs ont un poids de plus en plus important sur les marques. Toutes les industries de la mode essayent de mettre l'acheteur au centre de leur système. [...] Un changement qui est motivé par la réputation... sur internet. Sur les réseaux sociaux, la réputation peut-être démolie en trois fois rien. Si une marque fait un faux pas et que cette erreur est jetée en pâture dans l'arène d'internet, c'est une catastrophe. C'est donc un danger symbolique", déroule-t-il.
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Car l'industrie de la mode a un très fort impact sur notre environnement, et les consommateurs le savent. Elle est notamment responsable de 27 à 20% de la pollution de l'eau à l'échelle mondiale. Elle consomme également 25% des insecticides et 10% des herbicides utilisés dans le monde chaque année pour produire le coton. Face à ce triste bilan écologique, certains consommateurs "s'inscrivent dans une recherche de transparence que l'on trouve dans toute l'économie", explique Patricia Romatet. "On voit que les consommateurs font de plus en plus attention à la façon dont sont produits les vêtements". Et les maisons de couture font attention aux consommateurs. CQFD.
Comment ? En protégeant les animaux et...
Pour correspondre davantage aux attentes de ces consommateurs exigeants, certaines marques n'ont pas attendu d'être "jetées en pâture dans l'arène internet" et agissent, notamment sur la fourrure et le cuir. "Presque chaque jour, vous avez une marque qui annonce officiellement qu'elle va renoncer à mettre de la fourrure dans ses collections, comme Gucci ou Burberry", indique la directrice. "L'étape suivante est de se demander si demain, on sera dans un monde sans cuir, à l'image de la styliste Stella McCartney qui a décidé de le bannir de ses créations", s'interroge-t-elle.
"Cela ne signifie pas que les marques vont devenir des anges d'un coup, mais elles ont une prise de conscience forcée, car elles sont sous surveillance", résume Farid Chenoune.
... en recyclant nos fringues !
Nous portons seulement 30% de notre garde-robe. Et une étude britannique révèle que nous achetons en moyenne 20 kilos de vêtements neufs chaque année. Une première étape dans la recherche d'une mode plus éthique et écologique ne serait donc pas, tout simplement, de donner une seconde vie à nos vêtements, grâce au recyclage et aux friperies ? "C'est l'une des grandes nouveautés de ces trente dernières années", confirme l'historien. "On est passé de la friperie traditionnelle, qui rassemblait des vêtements usés pour les pauvres, [...] à une véritable institutionnalisation au début des années 1990".
"Depuis, il y a un véritable marché vintage avec ses acteurs, ses circuits économiques, ses festivals et avec ses points de vente", analyse-t-il. "Par exemple, à Paris , il y a un circuit de friperies qui s'appelle Guerrisol qui vendent en vrac, ou Kilo Shop, qui vend des vêtements au kilo. Vous choisissez ce qui vous plaît et vous donnez le reste à des sous-traitants qui vont le vendre dans des marchés moins exigeants. [...] C'est devenu un vrai mode d'achat et de consommation", avance-t-il.