Chaque dimanche soir, François Clauss conclut les deux heures du Grand journal de Wendy Bouchard avec une mise en perspective toute personnelle de l'actu.
Peut-être n’aurai-je pas dû libre ce pourtant délicieux roman, le Miroir de nos peines, signé Pierre Lemaître, qui me plonge depuis quelques jours dans la France de 1939/1940, celle de la drôle de guerre et de la débâcle.
Les images qui soudain se superposent.
Car Oui, j’ai entendu ces dernières semaines un chef m’exhortant à partir en guerre, oui, j’étais sûr de la force de notre pays, les meilleurs virologues, le meilleur système hospitalier…
Et puis soudain, comme dans le livre, voilà cette "drôle de guerre" qui est arrivée, l’incompréhension, les doutes, les questions, finalement nous n’étions pas si bien armés, où étaient les masques, où étaient les tests, où était la farine au supermarché ?
Et puis j’ai découvert, comme dans le livre, une armée si unie au début du mois de mars, qui soudain se délite, un discours si fédérateur qui soudain s’effrite, chloroquine ou pas chloroquine ? Retour au travail ou maintien du télétravail ? Reprise de l’école ou enfermement prolongé des enfants ? Zone rouge ou zone verte ? J’ai même entendu un Président de club de foot oubliant les 20 000 morts prêt à organiser un simple tournoi en un week-end pour préserver les intérêts supérieurs de son équipe.
Et voilà, Wendy, qu’après la drôle de guerre et la sensation de débâcle, ce sont depuis hier soir les contours d’un nouveau régime se dessinent.
Un pays où les gendarmes en hélicoptères surveillent les plages pour nous les interdire, un pays où une police sanitaire soudain foule du pied mon secret médical, une brigade de fonctionnaires assermentés qui décideront de ma liberté ou de mon isolement ;
Et des images du livre de Pierre Lemaître, qui se mêlent à celles glaçantes de la série qui m’accompagne tous les soirs, magnifique mais terrible « servante écarlate », cette évocation d’une grande démocratie devenue dictature entre les mains d’une secte qui a pris le pouvoir, et qui nous oblige à marcher masqués espacés de10 mètres sur les trottoirs.
Il est temps Wendy que je sorte de mes livres, de mes séries, de ce mauvais rêve du confinement.
La France de 2020 n’est pas celle de 1940 de Pierre Lemaitre, elle ne sera pas demain celle de la servante écarlate.
c’est aussi le pays qui applaudit tous les soirs à 20h00, le pays de ces soignants en réa qui ont bravé la peur et la maladie, en enchaînant pour un salaire de misère des journées de 12H00, le pays de ces chirurgiens qui se sont improvisés brancardiers, aux portes des hôpitaux débordés, le pays de ces éboueurs en Alsace qui sont devenus secrétaire de mairie pour organiser leur travail, le pays de ces personnels d’EPADH qui ont préféré dormir auprès des résidents pour mieux les protéger, le pays de ces routiers qui ont roulé des nuits entières sur des autoroutes désertes sans douche ni café pour nous livrer.
Oui, cette France qui est mon pays et que j’aime, le pays aux 5 000 cinémas, aux 7 millions de festivaliers et aux 26 000 bars et brasseries, aujourd’hui barricadés qu’il me tarde tant de retrouver.
Que les livres et les séries que j’aime tant en temps normal restent à l’Etat de fiction et que la vie, la vraie, avec les autres reprenne pour de bon.
Ce sera demain le début de la huitième semaine de confinement.