Chaque samedi, dans "Zoom arrière", Axel de Tarlé revient sur un fait économique ou sociétal qui a marqué la semaine.
Selon les chiffres Eurostat, la France est l’un des pays d’Europe où le coût du travail progresse le plus lentement.
Finie cette image de cigale et des 35 heures, la France est devenue le pays de l’austérité. Eurostat a publié cette semaine les chiffres sur l’évolution du coût du travail, dans les 27 pays de l’Union et la France est tout en bas du tableau, avec une progression d’à peine 0,9 %. A titre de comparaison, en Allemagne, le coût du travail progresse de 4,3 % et aux Pays-Bas de 5,1 %.
Comment expliquer cette modération salariale ? Est-elle subie ou volontaire ?
Les deux. Il y a effectivement, une partie subie. En France, les salaires progressent peu parce qu’il y a beaucoup de chômage, et donc cela étouffe les revendications salariales. Alors qu’aux Pays-Bas ou en Allemagne, on était (avant l’épidémie) au plein emploi, et donc les patrons sont bien obligés de sortir le carnet de chèque pour embaucher.
Et puis, l’autre raison qui explique cette modération salariale, c’est effectivement une politique délibérée, initiée sous François Hollande, qui vise à contenir le coût du travail, au nom de la compétitivité. C’est vrai que quand additionnez les salaires et les charges, la France était – et reste d’ailleurs - l’un des pays les plus chers d’Europe. Résultat, les entreprises ont délocalisé. Et donc, François Hollande puis Emmanuel Macron se sont lancés dans des politiques de baisse de coût du travail, des politiques qui portent aujourd’hui leurs fruits.
Si on va au bout de cette logique, pour garder nos emplois, il faudrait baisser toujours plus le coût du travail, et donc baisser les salaires. C’est sans fin.
C’est la limite de cette politique. Aujourd’hui, en gros, le coût du travail, en France et en Allemagne, est le même, autour de 35 euros de l’heure (salaires + charges). Mais, en Roumanie, on est à six euros de l’heure, six fois moins ! Donc, effectivement, c’est un combat perdu d’avance : un salarié français sera toujours plus cher qu’un salarié roumain.
Donc, pour s’en sortir, il faut miser sur la qualité. C’est la stratégie allemande : on achète des voitures allemandes, non pas parce qu’elles sont bon marché, mais parce qu’elles sont de qualité. Bien sûr, cela nécessite de monter en gamme, d’être innovant. Mais, c’est la clé pour réindustrialiser le pays. C’est une stratégie à double facette. D’une part, il faut maîtriser le coût du travail pour être compétitif en termes de prix. Et d’autre part, il faut monter en gamme pour être attractif en termes de produit. Cela fait un bon produit, au bon prix. Et là, vous êtes imbattable.