Ces premières décisions fracassantes, comme la promulgation d'un décret anti-immigration, agitent la communauté internationale. Donald Trump inquiète, mais pour Hubert Védrine, c'est la réaction des nations face au nouveau président américain qui déterminera son éventuelle dangerosité. "Le moment est venu de dépasser la sidération, l’indignation qui peuvent se justifier pour des tas de raisons, pour se demander ce que l’on fait fasse à ce phénomène. Je pense que Trump est beaucoup plus perturbant et choquant que dangereux", a estimé l'ancien ministre des Affaires étrangères, invité jeudi de la matinale d’Europe 1.
"L'abomination" Trump. "Trump a été élu, il faut que les gens admettent qu’il a été élu, même si ça semblait improbable pendant longtemps. Il faut sortir de la phase où Trump est une sorte de petite figurine que l’on perce de petites fléchettes tous les matins en se disant que l’on va faire disparaître l’abomination. Non, il est président", veut rappeler l’ancien chef de la diplomatie française. "Il va sans doute, par son comportement, son style et ses décisions créer une sorte de pétaudière au Etats-Unis, en plus il a la guérilla d’une grande partie de la société américaine contre lui". "La tension aux Etats Unis n’a jamais était aussi grande depuis la guerre du Vietnam", ajoute Hubert Védrine face aux nombreuses crispations que suscite le nouveau leader américain.
Des Républicains revanchards ? "Il ne faut pas le prendre au pied de la lettre, ni ce qu’il fait maintenant même s’il est en train de donner des gages à son électorat avec les première mesures", nuance encore l'ex-secrétaire général de la présidence de la République. "Il ne peut pas faire ce qu’il veut [...] il a le Congrès avec lui, mais en même temps le Congrès est rempli de gens que Trump a écrabouillé et humilié pendant sa campagne en les écartant, tous ses rivaux qui, à mon avis, l’attendent au tournant".
De l'importance de se positionner... Pour Hubert Védrine, il est essentiel que l'Union européenne trouve sa cohésion et se positionne rapidement face à la politique de l'ancien magnat de l'immobilier. "Il est plus urgent pour nous, en tant qu'Européens, de nous positionner sur ce que serait une politique plus réaliste avec la Russie, sur comment on fait pour faire survivre les accords de Paris sur le climat, qui sont fondamentaux, si Trump décidait de s’en retirer ou de les torpiller, comment on applique l’accord avec l’Iran en dépit d’un éventuel sabotage, et comment l’on redéfinit une politique commerciale qui ne soit pas celle de Trump ni des Chinois".
... pour influer la politique de Trump. "Dans ce que fait Trump, il y a des mesures qui vont enthousiasmer sa base mais d’autres qui sont tellement incohérentes et contre-productives que dans 3, 4 ou 6 mois ça va se retourner. Comme tout ça va mal fonctionner, il va devoir faire des changements, à coup de tweets, et modifier des ministres… Ça n’est pas quelqu’un qui arrive dans une sorte de cockpit, appui sur un bouton et fait tout ce qu’il avait dit. Il a déjà changé sur plusieurs points. Il faudrait accélérer cette évolution plus positive par une expression européenne plus forte", conclut Hubert Védrine.