Satisfaction du côté des policiers et de la Chancellerie, déception du côté des avocats. La décision du Conseil constitutionnel sur le nouveau régime de la garde à vue divise. Les Sages ont validé vendredi les dispositions de la réforme qui étaient contestées par les avocats. Ils ont en revanche émis une réserve sur les "auditions libres".
Les griefs des avocats hors-sujet
Dans le détail, le Conseil constitutionnel a donc jugé les griefs des avocats hors-sujet et les a déclarés "inopérants". Les Sages ont toutefois posé des conditions à la "disposition parfois dénommée "l'audition libre"". Les enquêteurs pourront continuer d'entendre en dehors du régime de garde à vue, et sans avocat, une personne soupçonnée d'avoir commis une infraction, si elle y consent. Mais ils devront l'informer de son droit de quitter les locaux de police ou de gendarmerie à tout moment, et de la nature et de la date de l'infraction dont elle est soupçonnée.
Depuis avril 2011, les avocats peuvent assister aux interrogatoires. Mais ils contestaient le fait de ne pas avoir accès aux dossiers de leurs clients, de ne pas pouvoir poser librement des questions ou encore de ne pas être présents lors de tous les actes de procédure (perquisitions, saisies, etc.). Mais le Conseil constitutionnel a jugé que "la garde à vue demeure une mesure de police judiciaire qui n'a pas pour objet de permettre un débat contradictoire sur sa légalité ou le bien-fondé des éléments de preuve".
Le combat des avocats continue devant la CEDH
La déception est donc grande chez les avocats. "La profession d'avocat considère que la réforme s'est arrêtée au milieu du gué", a estimé Me Patrice Spinosi, du barreau de Marseille. Mais ils ne s'avouent pas vaincus et comptent poursuivre leur combat devant la Cour européenne des droits de l'homme. "Sur le plan de la CEDH, les choses ne sont pas terminées", a prévenu le président du Conseil National des Barreaux (CNB) Thierry Wickers.
La Chancellerie s'est elle au contraire félicitée de la décision des Sages. Pour le ministre de la Justice, Michel Mercier, elle confirme que "les travaux parlementaires ont permis de trouver un juste équilibre" entre "le renforcement des droits de la personne placée en garde à vue" et "la prévention des atteintes à l'ordre public, la recherche de la vérité et la poursuite des auteurs d'infraction".
Pour la police, "le pire a été évité"
Du côté de la police, le syndicat Alliance s'est aussi réjoui de la décision, estimant que "le pire a été évité". Pour Alliance, le Conseil constitutionnel a "rappelé à tous que la garde à vue devait demeurer un lieu d'enquête".
Ces conditions entrent en vigueur dès la publication de cette décision au Journal officiel (JO), qui devrait intervenir d'ici quelques jours. La loi n'a pas à être modifiée pour cela, une réserve du conseil constitutionnel s'y incorporant automatiquement.